La règle d’or piège le PS

Plus que jamais d’actualité... la chronique de François d’Orcival
François d’ORCIVAL
Avec François d’ORCIVAL
Membre de l'Académie des sciences morales et politiques

Pour protéger les Français du déficit, un projet gouvernemental prévoit d’inscrire dans la Constitution, un ensemble de règles qui garantirait un retour à l’équilibre budgétaire. Les budgets votés par le Parlement devront, alors, se soumettre à cette « règle d’or ». Mais avant toute chose, la droite a besoin de la gauche pour faire passer cette règle devant le Congrès...

Combien de temps les socialistes vont-ils pouvoir résister à la « règle d’or » ? « C’est une très bonne règle », dit déjà Ségolène Royal. François Hollande y pense, mais pour plus tard. La résistance s’émousse. Il est vrai que l’adhésion de l’opinion est massive : quatre Français sur cinq soutiennent cette idée (78% selon le sondage de l’Ifop pour Paris-Match). Le père de l’idée, c’était François Bayrou – pour mettre Nicolas Sarkozy au pied du mur ; celui-ci a relevé le défi. François Fillon a pris le relai. Le Sénat et l’Assemblée ont voté le projet de loi de retour à l’équilibre des finances dans les mêmes termes : le 13 juillet, le texte était prêt pour un vote au Congrès, qui lui donnerait une force constitutionnelle. Sauf que, pour être adopté au Congrès, un texte doit être voté par une majorité des trois cinquièmes. La droite n’y suffit pas ; il faut la gauche. C’est elle qui, après avoir voté contre au Parlement, est mise au pied du mur. Comment faire pour ne pas rendre service à Sarkozy ? Règle d’or, piège en or.

Le 16 août, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy en font leur carte maîtresse pour calmer les marchés. Les Allemands l’ont déjà inscrite dans leur Loi fondamentale, les Britanniques l’ont votée, les Espagnols font de même. A Paris, Sarkozy, Fillon, tous le répètent : cette règle d’or n’est ni de droite ni de gauche, c’est un symbole d’unité nationale. Dernier en date, Claude Guéant déclare : « Il serait extrêmement important que le Congrès puisse se réunir et voter cette règle d’or. » Pourquoi ? « Pour que les opérateurs financiers le sachent… » Enfin un ministre qui le dit : il s’agit de consolider la note de crédit de la France.

Mais les socialistes font de la politique : si Sarkozy allait à Versailles sans s’être assuré du résultat, un vote négatif serait un échec personnel ajouté au risque de voir la France matraquée par les marchés. Certes, la droite accuserait les socialistes – mais ils répondraient : « nous avions prévenu ». D’où la mise en garde de Bernard Accoyer, sage président de l’Assemblée : « Les conditions ne sont pas réunies pour aller au Congrès », dit-il. Le piège se retournerait. Au contraire, en laissant ouverte l’hypothèse du Congrès, la droite pourra continuer à dénoncer ces socialistes « irresponsables » – jusqu’à ce qu’ils cèdent. « Nous avons jusqu’à l’été 2012 », prévient gentiment Accoyer.

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