Affaires internationales, l’atlantisme aujourd’hui : Europe, Turquie, Afghanistan, l’actualité de juin 2010

Thierry de Montbrial et François d’Orcival, de l’Académie des sciences morales et politiques
François d’ORCIVAL
Avec François d’ORCIVAL
Membre de l'Académie des sciences morales et politiques

Pour ce septième numéro d’Affaires Internationales, le dernier de la saison avant la rentrée de septembre, Thierry de Montbrial et François d’Orcival, tous deux membres de l’Académie des sciences morales et politiques, reviennent sur l’actualité internationale des mois de mai et juin. Au menu : l’Europe se met-elle sous protection américaine ? La Turquie s’éloigne-t-elle de l’atlantisme ? Que révèle le limogeage du général McChrystal en Afghanistan ?

Alors que tous les gouvernements européens annoncent plans de rigueur sur plans de rigueur, l’Europe n’est-elle pas en train de baisser les bras, d’abandonner toute ambition politique et stratégique ? Le « Wall Street Journal » montre par exemple que là où les Américains dépensent 54 milliards d’équivalents euros en recherche et développement militaire, les Européens n’y consacrent, tous ensemble, que 8 milliards. Autrement dit, l’Europe décroche.

À cela, Montbrial répond que les États-Unis sont, par nature, une puissance militaire, que les industries d’armement et les laboratoires de recherche constituent l’armature, le fer de lance de l’économie américaine, que les engagements extérieurs de l’Amérique mobilisent une grande partie de son budget et par conséquent de sa production. Sa sécurité intérieure et ses intérêts stratégiques se confondent.
Il n’en est pas de même pour les Européens dont une partie se sont considérés depuis toujours comme étant sous protection américaine… « Mars et Vénus » ? Un échange passionnant sur le fond du sujet !

Deuxième grande question : la situation de la Turquie dont l’attitude récente dans l’affaire des flottilles tentant de forcer le blocus de Gaza a montré qu’elle s’éloignait de la ligne diplomatique occidentale. Montbrial montre que le parti au pouvoir à Ankara, l’AKP, veut faire de ce pays une puissance majeure du Moyen-Orient, qu’il fait la paix avec l’ensemble de ses voisins et entend se rapprocher de l’Inde, de la Chine et du Brésil. Ambition turque : mettre fin à son alignement sur la stratégie américaine. Mais jusqu’où cela peut-il aller quand ce pays reste membre de l’Alliance atlantique ? Une « Turquie gaulliste » ? Le centre de gravité du monde est en train de se déplacer.

Enfin, le limogeage du général McChrystal par le président Obama signifie-t-il un tournant dans la conduite occidentale de la guerre en Afghanistan ? À la question de François d’Orcival, Thierry de Montbrial répond que ce limogeage est le révélateur de la « pétaudière » qui règne au sommet de la diplomatie américaine qui manifestement hésite. De sorte que le Pakistan est en train de prendre des initiatives en direction de certains chefs de tribus afghanes pour placer le pays sous son autorité. Mais avec un bémol : l’Inde aussi ne veut pas laisser passer l’occasion de jouer son propre jeu.
Voici donc vingt-cinq minutes d’entretien pour mieux comprendre ce qui se déroule sous nos yeux.



À propos de Thierry de Montbrial :

Thierry de Montbrial dirige l'Institut français des relations internationales (Ifri) qu'il a fondé en 1979. Il est membre de l'Académie des sciences morales et politiques de l'Institut de France. Il est également fondateur et président de la World Policy Conference.


Outre le journaliste bien connu de "Valeurs Actuelles" - dont il est président du comité éditorial - et du Figaro Magazine, ou même de LCI, François d’Orcival a été élu par ses pairs de tous les bords politiques, dès 1998, Président du Syndicat professionnel de la presse magazine et d’opinion (SPPMO). Il l'est resté depuis plus de dix ans !

Le Roman de l'Elysée : De la Pompadour à Nicolas Sarkozy, 2007, François d'Orcival, ed. du Rocher, 451 pages.
- François d'Orcival de l'Académie des sciences morales et politiques


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