Le poète disciple de Malherbe

L’auteur caché n° 8
Honorat de BUEIL
Avec Honorat de BUEIL de l’Académie française,

Jouez avec nous et découvrez cet auteur caché, certes un peu oublié, même s’il fut membre de l’Académie française. La règle du jeu est simple : dix indices biographiques, dix lignes d’extraits (ou un peu plus) et en moins de dix minutes, vous allez trouver de qui il s’agit.

Premier indice :

Notre auteur se prénomme François. Il est l’un des deux disciples célèbres de Malherbe (lequel se prénommait également François, ce n’est donc pas de Malherbe qu’il s’agit ici, voilà déjà une précision indispensable ! et pour cause, Malherbe n’était pas académicien puisqu’à sa mort, en 1628, l’Académie n’était pas encore fondée, elle ne le sera qu’en 1635), notre auteur caché donc appartient au début du XVIIe siècle puisque, né en 1582 à Toulouse, il accompagne, comme secrétaire, lorsqu’elle remonte à Paris, en 1605, la reine Marguerite de Valois (la fameuse reine "Margot" comme dit Dumas, épouse que répudiera Henri IV).

2eindice

L’orthographe du nom de notre auteur caché pose problème : d’aucuns l’écrivent avec un I, d’autres avec un Y. Qu’en dit l’Académie ? Elle fait une réponse de Normand ! sur son site, elle écrit son nom, avec un Y mais elle explique tout de suite qu’elle va adopter l’orthographe avec un I, parce qu’il existe une signature authentifiée de notre auteur caché ainsi orthographiée.

3e indice

Notre auteur caché fut en son temps un écrivain apprécié par ses sonnets, ses épigrammes, ses odes, ses stances et ses rondeaux. Il fréquentait à Paris l’hôtel Rambouillet, l’un des plus fameux salons littéraires du début du XVIIe siècle.

4e indice

Il compte parmi les tout premiers académiciens de l’Académie française, laquelle fut fondée, par lettres patentes du roi Louis XIII en 1635. Or, un autre académicien de cette même époque, Paul Pellisson, qui a rédigé une Histoire de l’Académie française depuis son établissement jusqu’en 1652, cite notre auteur parmi les premiers membres de l’Académie. En 1635, quand l’Académie est créée, notre auteur cachél est âgé de 53 ans. Il va y siéger 11 années puisqu’il meurt en 1646 à l’âge de 64 ans. Mais durant ces 11 années, si on en croit sa biographie sur le site de l’Académie, il la fréquenta peu, ne fut guère assidu aux séances et même, ne se priva pas de médire de cette Académie naissante.

5e indice

Mais puisqu’il fut reconnu comme l’un grand écrivain de son époque, penchons-nous sur son œuvre littéraire. Notre auteur caché a essentiellement rédigé des vers. Paul Pellisson formule ainsi son jugement : « c’est de ses vers qu’il a tiré sa plus grande gloire, comme il le prétendait bien aussi ; et véritablement, il faut avouer qu’ils ont une facilité, une clarté, une élégance et un certain tour que peu de personnes sont capables d’imiter ». Et Voltaire lui-même, un siècle plus tard, ne désavouera pas le talent de notre auteur caché : « On peut le compter, dit-il, parmi ceux qui ont annoncé le siècle de Louis XIV. Il reste de lui un assez grand nombre de vers heureux ».

6e indice

Alors pour juger de ces vers heureux, écoutons d’abord cette satire de notre auteur caché, lue par Fernand Guiot.
-
« Pierre qui, durant sa jeunesse,
fut un renommé savetier
est superbe de sa richesse
et honteux de son vieux métier… »


Voilà dressé, en huit strophes, le portrait d’un nouveau riche, d’un parvenu, portrait qui ne manque pas de verve, de verdeur et de bonne humeur, qui n’a rien perdu de son actualité et qui n’est pas sans annoncer les futurs portraits du grand La Bruyère.


7e indice

A ce stade, vous avez donc situé notre auteur caché dans son époque, le XVIIe, vous savez qu’il écrivit des vers, et qu’il fut l’un des tout premiers académiciens, ce n’est pas si mal !
Présentons de lui maintenant un autre aspect sympathique : il fut épris, durant quarante ans, d’une seule et unique dame, à laquelle il donne, selon la mode, le prénom grec de Cloris, laquelle eut le mauvais goût de lui préférer un mari très riche ! Mais à 62 ans, notre auteur ne désespère pas de réaliser son rêve : Cloris est devenue veuve, elle reste toujours belle malgré les ans, et il lui exprime sa flamme, en vers bien entendu !

« Cloris, que dans mon cœur j’ai si longuement servie
et que ma passion montre à tout l’univers
ne veux-tu pas changer le destin de ma vie,
et donner de beaux jours à mes derniers hivers ? »


Avouez que cet amour est touchant, joliment exprimé, et que, pour une femme, il offre le réconfort de penser que l’âge n’ôte rien à la beauté et à la séduction. Notre auteur a décidément du talent et il est bien injuste qu’il soit tombé dans l’oubli ! Ce sonnet, intitulé « la Belle Vieille », est l’un de ceux qui, heureusement, sont devenus célèbres.

8e indice

Mais l’âge est là, la vieillesse approche et notre auteur, las de la vie mondaine, tant à Paris qu’à Rome où il vécut plusieurs années comme secrétaire d’ambassade, se retire dans ses terres, à Saint-Céré dans le Lot. Là, il va composer quelques uns de ses plus beaux poèmes.

« Mon âme, il faut partir. Ma vigueur est passée,
Mon dernier jour est dessus l’horizon.
Tu crains ta liberté. Quoi ! n’est pas lassée
D’avoir souffert soixante ans de prison ? »


9eindice

Il était l’un des deux disciples célèbres (encore qu’oubliés de nos jours) de Malherbe. Alors, voici le nom du second disciple : Honorat de Bueil, marquis de Racan (1589-1670), lequel fut lui aussi élu à l’Académie française dans le courant de l’année 1634 et donc fut un confrère de notre auteur caché. Le pauvre Racan était poète, certes, mais affligé d’un bègaiment qui l’obligeait à faire lire ses discours par des tiers ! Bref, Racan et notre auteur caché se connaissaient, se côtoyaient, se concurrençaient peut-être mais à cette époque, tout un chacun s’exprimait en vers.

10e indice

Lorsque notre auteur caché mourut le 28 décembre 1646, son siège à l’Académie fut déclaré vacant, et, quelques mois plus tard, c’est le très glorieux Pierre Corneille qui lui succède en 1647.

Avez-vous trouvé notre auteur caché ? Si oui, bravo car ce n’était pas facile !
Et si vous n’aviez pas trouvé, cliquez sur le document ci-joint

Le comédien Fernand Guiot a bien voulu lire les vers de notre auteur.


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