René de Obaldia, un moment essentiel de ma vie

Extrait de "L’essentiel avec..." René de Obaldia, de l’Académie française. Entretien avec Jacques Paugam
René de OBALDIA
Avec René de OBALDIA de l’Académie française,

Dans la version intégrale de l’émission "L’essentiel avec...", René de Obaldia, de l’Académie française depuis 1999, a été invité par Jacques Paugam à répondre à sept questions. Ici, nous avons choisi de vous faire lire et écouter la toute première question -quel est à vos yeux le moment essentiel de votre carrière ? - et la toute première réponse de l’académicien. Ce grand auteur de théâtre s’est prêté, avec tout l’humour qu’on lui connaît, au jeu de ce "questions/réponses", évoquant pour nous ses souvenirs et son parcours personnel.

1- Dans votre itinéraire professionnel, dans votre carrière, quel a été à vos yeux, le moment essentiel ?

René de Obaldia : J’ai horreur du mot carrière. Jamais je n’aurais pensé à faire carrière. Quand on est poète, il s’agit d’une vocation. Je me souviens avoir rencontré Daniel Rops (1901-1965, de l’Académie française). Il parlait du nez et m’avait dit : “Il faut penser à votre carrière”. Et je lui ai répondu : “Je n’ai pas envie de faire carrière, c’est pour moi une vocation !”.

Pour répondre, malgré cela, au moins approximativement à votre question, c’était le moment où j’ai rencontré Clara Malraux, la première femme d’André Malraux. J’avais 17 ou 18 ans, j’écrivais des poèmes, des textes courts que j’envoyais à toutes les maisons d’édition et aux revues qui étaient très importantes à l’époque, La Table Ronde, Le Mercure de France...Ils m’étaient refusés, avec la formule : “Votre œuvre est admirable mais n’entre pas dans notre collection”.
Et puis je les ai envoyés à Clara Malraux, qui avait fondé une revue, et elle m’a renvoyé un télégramme pour me rencontrer à tout prix. Elle était enthousiaste et m’a publié. Cela a été pour moi dans ma carrière une chose très importante. Ce n’était pas Midi, c’était un poème que j’avais écrit très tôt, je ne sais plus la date, j’ai du mal à retenir les dates. J’oublie la date de ma naissance, de ma mort. Comme disait Jean Paulhan :“ La mort ! Pourvu que j’arrive jusque là !
Donc c’est Clara Malraux qui a généré ce déclenchement pour moi. J’ai été reconnu, accepté dans d’autres revues. C’est ainsi que j’ai été publié dans la collection la Porte Ouverte, Robert Kanters, chez Julliard, qui étaient les grandes éditions de ce moment là.

René de Obaldia avec Jacques Paugam, à Canal Académie
© Canal Académie




Le théâtre était un accident pour moi. Je ne croyais pas vraiment écrire pour le théâtre. Ce qui m’intéressait, c’était les belles lettres, la poésie avant toute chose et puis des formes romanesques, la littérature. Le théâtre a été pour moi une chose merveilleuse. Une rencontre tout à coup, d’abord avec Jean Vilar qui m’a mis le pied à l’étrier en montant Genousie en 1960. Et puis ensuite Le Vent dans les branches de sassafras a été le grand succès en 1965, c’était même un triomphe.
Et je dois le dire aussi, la vocation théâtrale m’est venue à cause de merveilleux interprètes dont Michel Simon, qui a créé le rôle du patriarche du Vent dans les branches de sassafras, un western de chambre. Le cher Michel Simon avait la mémoire qui défaillait, c’était assez terrible. Au bout de 15 jours il savait à peine le texte. C’était très difficile ! Sur scène il y avait des grands moments d’arrêt, c’était la consternation pour ses camarades. Et parfois même il disait un texte qui n’était pas de moi, il lui revenait à l’esprit des répliques de Fric-Frac ! Il m’avait pris à part une fois : “Vous savez Obaldia, si ma mémoire me fait défaut c’est à cause d’une teinture sur mes cheveux que l’on m’a faite pour un film. C’est cette mauvaise teinture qui m’a grignoté le cervelet”. Enfin on est arrivé à la générale : salle pleine, archi- comble. C’était le retour de monsieur Simon, cela faisait 6 ans que l’on ne savait pas ce qu’il était devenu. Son énorme présence suppléait au rétrécissement du texte. Ce fut le triomphe. Michel Simon se présente à l’avant scène, les larmes aux yeux. Il arrive à faire taire le public, enfin. Et ça a donné ceci : “ La pièce que nous avons eue l’honneur de présenter devant vous est de … l’honneur… la pièce.. ah merde j’ai oublié le nom de l’auteur !”.
C’était un évènement assez unique dans l’histoire du théâtre.



Dans l’intégrale de l’émission notre invité répond aux 6 autres questions de Jacques Paugam :

o Qu’est-ce qui est essentiel dans votre domaine d’activité ?

o Qu’est-ce qui est essentiel à dire aujourd’hui sur l’état de la société ?

o Quelle est selon vous la plus grande hypocrisie de notre temps ?

o Quel est l’événement de ces dernières années ou la tendance de ces dernières années qui vous laisse le plus d’espoir ?
o Quel a été le plus grand échec de votre vie ?

o Aujourd’hui quelle est votre motivation essentielle dans la vie ?




En savoir plus :

- Pour découvrir les réponses aux 6 autres questions essentielles, lisez l’intégralité du texte et écoutez en entier l’émission "L’essentiel avec... René de Obaldia, de l’Académie française."

- René de Obaldia, membre de l'Académie Française.

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