Le tout bio est-il possible ?

avec Bernard Le Buanec, de l’Académie d’agriculture

Née au début du XXème siècle, sur des bases ésotériques, l’agriculture biologique (AB) est passée d’une tendance alimentaire à la mode à un véritable sujet de préoccupation pour les consommateurs.
Le Grenelle de l’environnement de 2008 s’est fixé comme objectif que d’ici à 2020, 20% de la surface agricole utile soient consacrés à l’agriculture biologique, mais quels sont les atouts et les problématiques inhérents à celle-ci ? Bernard Le Buanec, membre de l’Académie d’agriculture, évoque tous ces sujets dans son ouvrage Le tout bio est-il possible ?, aux éditions Quae.

Le bilan de santé de la Politique agricole commune (PAC) et le Grenelle de l'environnement qui avaient pour objectif d'augmenter les surfaces certifiées AB en France pour atteindre les 6% de la surface agricole utile (SAU), aujourd'hui, en 2012, ont envoyé un message très favorable à l'agriculture biologique. Et même si aujourd'hui en France, seulement 4 % de la surface agricole utile est consacré au bio, les 27 pays de l'UE compte 8,3 millions d' hectares de terres gérés en mode biologiques par 208 676 exploitants. Cet essor a poussé l'Académie d'agriculture de France à rédiger cet ouvrage Le tout bio est-il possible? 90 clés pour comprendre l'agriculture biologique aux éditions Quae. Riche en données techniques, scientifiques et économiques précises, cet ouvrage a pour objectif d'éclairer le consommateur sur les différentes dimensions de l’agriculture biologique.

Dans cette émission, Bernard Le Buanec, membre de l'Académie des technologies et de l'Académie d'agriculture et coordinateur de cet ouvrage, explique que l'un des objectifs de ce travail collectif est aussi de répondre à la question choisie pour titre : pourrait-on vivre uniquement avec de la culture bio? Or, selon les statistiques de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture), «Pour nourrir une population de 9 milliards d'humains en 2050, il faudrait augmenter notre production de 70%. Dans les conditions actuelles de nos connaissances si l'agriculture bio remplaçait l'agriculture conventionnelle, les rendements diminueraient de 40 à 50 %». Il n'y a pas que l'alimentation à prendre en compte, il y a aussi des besoins de productions agricoles pour l'énergie et pour la transformation en produits industriels. Se pose aussi le problème de la surface disponible, selon la FAO (Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture), 2 millions d'hectares de terres disponibles ce qui est insuffisant pour augmenter de 70% la production, c'est pourquoi «il ne faut pas opposer l'agriculture conventionnelle et l'agriculture biologique, l'idéal serait d'avoir une agriculture qui permette de mieux préserver l'environnement, même si je reste persuadé que l'agriculture biologique, seule, avec une interdiction systématique des produits de synthèse, a pour le moment un effet trop fort sur la production pour que ce soit une solution d'avenir», renchérit l’académicien qui prend pour exemple la production de céréales en France :« les rendements moyens en agriculture conventionnelle sont de l'ordre de 70 à 80 quintaux à l'hectare ; en agriculture biologique ils sont de 30 à 40 quintaux, c'est -à-dire réduits de moitié. »

Même si les produits AB sont plus riches en oligoéléments, en vitamines, en minéraux, antioxydants....le lien avec un effet sur la santé n'a pas encore été établi. Si 91 % de la population pense qu'il faut manger bio pour améliorer sa santé, le groupe de travail qui a rédigé cet ouvrage a la même conclusion que celle de l'AFSSA ( Agence française de sécurité sanitaire des aliments.) : «Dans le cadre des connaissances actuelles rien ne montre que les produits bio sont meilleurs pour la santé. Une centaine de publication dans le monde confirme ces résultats, l’agriculture bio aujourd'hui n'apporte pas d'avantages significatifs sur la santé du consommateur», souligne Bernard Le Buanec, qui rappelle l'importance des qualités organoleptiques, c'est-à-dire les propriétés d'un aliment reconnues par les organes des sens (couleur, odeur , saveur, odeur, texture...) des produits ayant l’appellation AB.

Rappelant le rôle protecteur de l'agriculture biologique sur l'environnement, Bernard Le Buanec sait très bien que le marché bio « est un marché de niche pour une catégorie de population plus aisée que la moyenne», mais il est important que tous aient en main les différentes dimensions de l'agriculture biologique, ce que permet cet ouvrage riche en infographies.

- Exemples aléatoires de questions choisies parmi les 90 posées dans l'ouvrage :

14. Quel est le rôle du sol ?

27. Toutes les espèces peuvent-elles être cultivées en agriculture biologique ?

70. Les produits bio sont-ils globalement plus nourrissants ?

76. les produits bio contiennent-ils des résidus de pesticides de synthèse ?

88. Pourquoi les produits bio coûtent-ils plus chers ?

Bernard Le Buanec, coordinateur de l’ouvrage  Le tout bio est-il possible ? et membre de l’Académie d’agriculture de France
DR Clément Moutiez



Bernard Le Buanec
est membre de l'Académie des technologies et de l'Académie d'agriculture de France. Il a dirigé cet ouvrage collectif. Durant sa carrière, il a en particulier étudié l'agronomie en zone intertropicale et travaillé sur les semences. Il a coorganisé, avec la Fédération internationale des mouvements d'agriculture biologique et la FAO, la première conférence mondiales sur les semences biologiques.

- Ecoutez d'autres émissions sur le thème de la gastronomie ou sur la science

Cela peut vous intéresser