L’asphyxie fiscale des PME

Plus que jamais d’actualité... la chronique de François d’Orcival de l’Académie des sciences morales et politiques
François d’ORCIVAL
Avec François d’ORCIVAL
Membre de l'Académie des sciences morales et politiques

Ministre des Finances et l’un des rares ministres expérimentés de ce gouvernement, Pierre Moscovici ne prétend pas moins une chose et son contraire. Il se bat, dit-il, pour défendre les PME et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) parce qu’elles constituent l’essentiel du tissu économique français ; il les voudrait plus nombreuses et plus fortes. Mais dans la même démonstration (au grand jury RTL Le Figaro LCI), il confirme qu’il va taxer le capital à la même hauteur que le travail. Toujours au nom de la justice… Seulement, c’est une ânerie qui va compromettre l’ambition annoncée.

La gauche ne connaît l’entreprise qu’à travers les déclarations des syndicats et les manuels des professeurs. Elle oppose les PME et les ETI aux « grands groupes » et aux « multinationales » assimilés aux « riches », mais elle ne sait pas comment ça marche. 95% de ces petites entreprises ne sont pas cotées en Bourse ; elles ne font pas appel à l’épargne publique mais au capitalisme de proximité – l’argent du créateur, celui de ses proches. Le jeune patron met toute son énergie et ses moyens à développer son affaire, à la muscler pour la faire grandir ici et à l’étranger. Il préfère s’attribuer un petit salaire pour tout miser sur la performance, afin de pouvoir investir encore et résister à la concurrence. Or c’est sur son résultat qu’il peut se rémunérer : par les dividendes que dégage son activité. Un dividende lui-même minoré par l’impôt payé sur les bénéfices.

Si, en plus, et c’est le projet gouvernemental, le dividende, déjà fortement imposé, doit être matraqué, on ruine l’envie d’entreprendre en même temps que le capitalisme de proximité (sans parler de tous les actionnaires investis en Bourse bien sûr). On place le petit patron dans une impasse : ou bien il se rémunère au détriment de sa performance, ou bien il baisse les bras. Succès garanti.

Mieux, avec le passage de la taxation des plus-values de 19 à 45%, on grippe le moteur de la création d’entreprise, celui qui permet à l’entrepreneur d’espérer vendre une activité en pleine santé pour en développer une autre ou même l’introduire en Bourse. Inutile de rêver aux Bill Gates et autres Steve Jobs français, ceux-là naissent dans des pays de liberté. En France, on les tue dans l’œuf. Le capital ne tombe pas du ciel, il est toujours le produit du travail et sa source.

Le texte de cette chronique est paru dans Le Figaro Magazine du samedi 21 septembre 2012. Elle est reprise ici par son auteur, avec l’aimable autorisation de l’hebdomadaire. Les propos de François d’Orcival n’engagent que lui-même, et non pas l’académie à laquelle il appartient ni l’Institut de France.

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