Une circulaire pour refonder l’enseignement de l’orthographe

avec Jean-Michel Blanquer, directeur général de l’enseignement scolaire
Avec Hélène Renard
journaliste

A l’occasion de l’envoi, en avril 2012, d’une circulaire du Ministère de l’Éducation nationale visant à renforcer l’enseignement de l’orthographe à un ensemble de professeurs de l’école primaire, Hélène Renard reçoit Jean-Michel Blanquer, directeur général de l’Enseignement scolaire, qui en explique le contenu, la nécessité après avoir rappelé la dégradation observée de l’orthographe chez les jeunes élèves.

Émission proposée par : Hélène Renard
Référence : foc705
Télécharger l’émission (7.86 Mo)

_
Aujourd'hui le renforcement de l’enseignement de l’orthographe est devenu un enjeu majeur pour la réussite des élèves, tant la maîtrise de l’orthographe constitue un élément significatif de la maîtrise de la langue française, notamment concernant la compréhension des écrits et l’identification des mots.

Jean-Michel Blanquer, directeur général de l’Enseignement scolaire, est à l'initiative d'une circulaire, envoyé en avril 2012 à tous les professeurs des classes de CE2, CM1 et CM2, visant à rappeler cette importance cruciale de l'orthographe dans l'enseignement primaire.

L'orthographe en France : ne relâchons pas nos efforts !

Au cours des décennies passées, on a effectivement assisté à une dégradation de l’orthographe chez les jeunes élèves comme l'ont démontré diverses études : la même dictée d’un texte d’une dizaine de lignes a été, par exemple, proposée aux élèves de 1987 et de 2007 : le nombre d’erreurs a augmenté en moyenne de 10,7 en 1987 à 14,7 en 2007.
Jean-Michel Blanquer rappelle que ceci n’est pas un problème spécifiquement français, mais qu'il se retrouve dans de nombreux pays, ce qui tendrait à refléter une dégradation plutôt généralisée du rapport à la langue écrite.
«Vis-à-vis de cette question, il ne s'agit pas d’être fataliste ou de baisser les exigences. En s’appuyant sur des études et sur des évaluations de français, nous avons pu constater un rebond ces dernières années, nous sommes donc confiants dans le fait qu’avec une stratégie appropriée, une amélioration est possible, qu’il ne faut pas relâcher nos efforts.»

Jean-Michel Blanquer à Canal Académie
© Canal Académie

L'orthographe : un enjeu majeur pour la réussite des élèves

Au problème de l’orthographe correspond en réalité, pour Jean-Michel Blanquer, la question de la maîtrise de l’écrit. «Quand un élève écrit correctement, c’est le signe qu’il comprend bien ce qu’il écrit. C’est autant je dirais une question de forme que de fond, et même de compréhension». Finalement l’orthographe a surtout à voir avec la notion de « structuration » de la langue, et la structuration mentale est fondamentale dans le rapport à autrui. On comprend ainsi l’enjeu éducatif majeur que cette discipline peut représenter.

L'ère du numérique : amie ou ennemie ?

A l'heure où existent des correcteurs orthographiques sur les ordinateurs, on entend souvent dire "il n'est pas nécessaire que les enfants se cassent la tête avec l'orthographe, la machine s'en occupera !". Le raisonnement est fallacieux. Loin de penser que cet outil numérique ne soit que négatif, Jean-Michel Blanquer nuance ainsi son point de vue :
«L'outil numérique représente à la fois le risque de tomber, pour l’usager, dans la facilité mais également l’opportunité pour celui-ci, grâce aux correcteurs automatiques par exemple, de prendre conscience de ses difficultés. C'est à double tranchant.» Le correcteur automatique permet en effet de visualiser la bonne orthographe (et donc de mieux la mémoriser) et de voir aussi la mauvaise ! La pratique des «sms» est à cet égard symptomatique : alors que les abréviations et autres signes étaient auparavant omniprésents dans les «sms» des jeunes, l'apparition du correcteur orthographique a rendu cette pratique beaucoup moins répandue. Tout n’est donc qu’une question de maîtrise.

Une circulaire aux orientations pédagogiques concrètes

Deux axes émergent de cette circulaire : mettre en place un enseignement progressif et explicite, et porter une attention permanente à l’orthographe. Pour ce faire, le ministère entend s’appuyer sur les programmes officiels ainsi que sur les professeurs. Jean-Michel Blanquer préconise une action très simple : utiliser le mot orthographe, ne plus avoir peur de le prononcer (on l'avait remplacé par une sorte de périphrase confuse), revaloriser la discipline aux yeux des élèves. Deux piliers sont à la base de cet enseignement : le vocabulaire et la grammaire, qui doivent être renforcés par un exercice bien connu ... la dictée. Et ce, un peu chaque jour... Et toutes les disciplines peuvent servir à apprendre la bonne orthographe, pas seulement le français, mais les autres aussi !

Ecoutez les précisions données par Jean-Michel Blanquer dans cet entretien qui se termine en parlant justement de cette fameuse dictée. Accompagnée de la copie de texte, elle est au fondement de l’enseignement de l’écrit, d'où, d’ailleurs, son rétablissement au Brevet des collèges. «En France, nous n’incitons pas suffisamment à écrire. Il faut s’exercer, dès son plus jeune âge, par des petits récits. Quant aux professeurs, nous leur conseillons d'être exigeants mais de mieux accepter l’erreur, de rester bienveillant devant les difficultés

Un sujet de longue durée donc, que cette refondation de l'orthographe, devenue une des priorités du Ministère de l'Éducation Nationale pour l'enseignement primaire mais aussi secondaire d'aujourd'hui.

En savoir plus:

Pour plus d'informations consultez le site du Ministère de l'éducation.

Retrouvez les émissions de notre série «Un recteur, une académie, une expérimentation», qui a pour but de faire partager une «bonne pratique» pédagogique, déjà mise en route dans une académie (au sens de structure éducative).

Écoutez :
- Refonder l’enseignement des langues de l’Antiquité par de nouvelles pratiques

- Les sciences intégrées à l’école, suite logique de La main à la pâte

Consultez le site des professionnels de l'éducation :
EDUSCOL

Cela peut vous intéresser