Un artiste de l’industrie

Plus que jamais d’actualité... la chronique de François d’Orcival de l’Académie des sciences morales et politiques
François d’ORCIVAL
Avec François d’ORCIVAL
Membre de l'Académie des sciences morales et politiques

Les Allemands nous font la leçon ? Leurs constructeurs automobiles, Volkswagen, Daimler, BMW, dégagent des profits qui font envie ? Mais derrière ces profits et la « qualité allemande », qu’y a-t-il ? De la qualité française, de la recherche française, des ingénieurs français. Pourquoi ne pas le dire plutôt que se lamenter sur notre déclin industriel ? Nous avons des artistes dans notre industrie.

Si les constructeurs automobiles allemands – mais aussi mondiaux – ont ce succès, ils le doivent à un équipementier français, Valeo (« je vais bien », en latin), qui leur fournit les dernières innovations de la technologie en matière de moteurs non polluants (électriques, hybrides, stop and go, etc), d’électronique de bord, d’éclairage intelligent, d’aide à la conduite…Lui aussi pourrait prétendre à figurer au palmarès des « modèles » : il fait mieux que le marché, en Europe, en Asie, en Amérique. Il a 70 000 salariés dans le monde, dont 40% en Europe. Ses usines sont partout, mais son siège, ses bureaux d’études, ses laboratoires de recherche, ses principaux centres de production sont en France.

C’est à partir de ses racines françaises qu’il rayonne : 30% de ses clients sont allemands, autant sont asiatiques, 15% américains, et il a plus d’une année de chiffre d’affaires en commandes. Les coûts français ne lui font pas peur ; la mondialisation, il en vit. Son directeur général, Jacques Aschenbroich, ne se plaint pas : la compétitivité, c’est son métier. Mais s’il recrute trois cents ingénieurs français par an, s’il peut développer sa recherche, sans laquelle il perdrait ses clients, c’est aussi grâce au dispositif fiscal du crédit impôt recherche voté durant ce quinquennat. Toute l’industrie française en profite.

Noël Goutard, qui fut (de 1987 à 2000) le « patron de fer » de ce grand groupe, disait au Journal du management : « Le XXIe siècle ne sera pas asiatique mais européen. L’Europe a tous les atouts : homogénéité sociale, paix publique, maturité politique, justice sociale, compétences humaines remarquables… » La croissance ne serait donc pas réservée à la Chine, à l’Inde, à l’Amérique ou au Brésil. A la condition tout de même de ne pas détruire nos atouts, mais plutôt de soutenir le développement de cette France qui « va bien ». Or ce sont ces grandes entreprises que François Hollande veut surtaxer. Parce qu’elles vont trop bien ?

Le texte de cette chronique est paru dans Le Figaro Magazine du samedi 3 mars 2012. Elle est reprise ici par son auteur, avec l’aimable autorisation de l’hebdomadaire. Les propos de François d’Orcival n’engagent que lui-même, et non pas l’académie à laquelle il appartient ni l’Institut de France.

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