Du vert dans le gaz

Plus que jamais d’actualité... la chronique de François d’Orcival
François d’ORCIVAL
Avec François d’ORCIVAL
Membre de l'Académie des sciences morales et politiques

Pour qui travaillent les Verts ? Question évidemment déplacée…Mais pourquoi veulent-ils tant nous faire adopter le modèle allemand en matière énergétique, modèle qu’ils condamnent pour tout le reste ? Parce que l’Allemagne a décidé de sortir du nucléaire et qu’elle se prétend le meilleur élève d’Europe contre le réchauffement climatique ? Certes, elle investit lourdement dans l’éolien et le solaire. Mais pour autant, quel bilan !

L'allemagne est le plus grand pollueur d’Europe et subventionne allègrement ses mines de charbon. La preuve ? Lisez Bernard de Montferrand : il était notre ambassadeur à Berlin et publie, avec Jean-Louis Thiériot, un tableau comparatif France Allemagne, l’heure de vérité (Tallandier). La France a beaucoup à apprendre de sa voisine. Excepté précisément dans l’énergie, son grand point faible.

Les Allemands paient leur électricité près de deux fois plus cher (1,8) que les Français ; ils rejettent dans l’atmosphère cinq fois plus de CO2 que nous, et ils dépendent deux fois plus que nous des Russes pour leur gaz et leur pétrole.
Explication ? Le charbon représente outre Rhin 46% de l’énergie et 57% de la production d’électricité. En France, c’est le nucléaire, pour 41% de l’énergie, et 76% de l’électricité. En fermant ses réacteurs, l’Allemagne va forcer sur le charbon. Les énergies renouvelables ? Montferrand cite les chiffres : le mégawatt nucléaire revient (après amortissement) à 45 euros, l’éolien terrestre à 80, l’éolien en mer à 150 et le solaire à 200…En outre, en contrepartie de leurs émissions de CO2, les électriciens allemands devront acheter des « certificats » anti-pollution, ce qui pèsera sur leurs prix. Quant aux coûts d’investissement pour sortir du nucléaire, ils sont estimés entre 30 et 200 milliards – autant dire que l’on n’en sait rien.

Reste les importations. L'Allemagne dépend déjà de la Russie pour le tiers de son gaz et de son pétrole. Dépendance qui va s’accentuer, avec ses conséquences, note Montferrand, en termes de projets industriels et de prise en compte des intérêts russes. C’est en Allemagne, sur la Baltique, qu’était inauguré, le 8 novembre, le gazoduc Nord Stream, réseau d’alimentation européen en gaz russe. François Fillon soulignait à cette occasion le « rôle stratégique » joué par la Russie pour les approvisionnements de l’Europe. Stratégique en effet. Et ce ne sont pas les Verts qui vont le démentir.

Le texte de cette chronique est paru dans Le Figaro Magazine du samedi 19 novembre 2011. Elle est reprise ici par son auteur, avec l’aimable autorisation de l’hebdomadaire. Les propos de François d’Orcival n’engagent que lui-même, et non pas l’Académie à laquelle il appartient ni l’Institut de France.

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