Affaires internationales : Egypte, Tunisie, Algérie... l’actualité de février 2011

par Thierry de Montbrial et François d’Orcival, de l’Académie des sciences morales et politiques
François d’ORCIVAL
Avec François d’ORCIVAL
Membre de l'Académie des sciences morales et politiques

Nouvelle émission consacrée aux affaires internationales : chaque mois, Thierry de Montbrial et François d’Orcival, tous deux de l’Académie des Sciences morales et politiques, analysent les principaux points chauds de l’actualité mondiale. Dans cette émission, ils observent dans le détail ce qui s’est passé en Tunisie, en Egypte et sur d’autres rives de la Méditerrannée, pour aller plus loin dans l’analyse du phénomène... évoquant, entre autres, une référence au « modèle turc ».

Cette émission a été enregistrée le 21 février 2011 au lendemain du départ de Hosni Moubarak de la présidence égyptienne.

Confrères de l’Académie des sciences morales et politiques, François d’Orcival et Thierry de Montbrial décryptent ensemble l’actualité internationale. Depuis le mois de janvier, tous les projecteurs sont braqués sur les pays de la rive sud de la Méditerranée.

Les diplomates ont-ils été surpris par ces événements ? Certes, mais c’est un mauvais procès que l’on fait à la diplomatie, souligne Montbrial, car les événements ne s’enchaînent pas naturellement selon un mode « linéaire » de causes et de conséquences. On aurait pu s’attendre à des mouvements en Corée du nord, c’est au Maghreb qu’ils se sont produits, et selon la loi de Tocqueville, pour qui le pire moment pour un mauvais gouvernement est celui où il commence à se réformer.

Nous voici donc devant un enchaînement de révoltes populaires dans les pays arabes, depuis le Maghreb jusqu’aux émirats. « Il y a là une analogie avec les révolutions en chaîne de 1848 en Europe », dit Montbrial. La question est : sur quoi cela peut-il déboucher ? François d’Orcival et Thierry de Montbrial observent dans le détail ce qui s’est passé en Tunisie, en Egypte, ailleurs, pour aller plus loin dans l’analyse du phénomène.

En Tunisie, cela se passe sans drame, remarque Montbrial, et l’après- Révolution n’est pas si mal engagé. Le danger islamiste, s’il existe, ne doit pas être surévalué et il est largement contenu. La suite, réforme des institutions, liberté politique, réformes économiques, sera extrêmement important comme modèle éventuel pour les autres pays arabes.

L’Algérie est-elle contaminée ? Certes, mais la liberté d’expression y est plus grande ; il existe donc des soupapes de sécurité. En outre, l’armée algérienne est puissante et dissuasive.

En Egypte, l’armée a joué le rôle majeur : tant pour accompagner la revendication populaire de voir Moubarak, quitter le pouvoir, que pour ramener le calme et restaurer le fonctionnement élémentaire de l’économie.
L’armée ne pouvait pas s’abstraire du soutien populaire, insiste Montbrial, d’où son comportement habile pendant ces « journées ». Sa marge de manœuvre reste étroite. Il faut également souligner le rôle qu’ont eu dans le développement de ces événements les « réseaux sociaux » sur Internet. Partout, la retenue antérieure a disparu ; la liberté d’expression va de plus en plus de soi.

Quant aux Frères musulmans, ils sont en Egypte infiniment plus puissants qu’ailleurs et notamment en Tunisie. Pour autant, ils appartiennent à une autre génération que celle qui a manifesté dans la rue ; ils ont l’ambition de prendre part au pouvoir, pas de l’exercer.
D’une manière générale, ce que l’on voit partout, c’est la référence au « modèle turc » : une armée, colonne vertébrale du régime mais pas trop forte, pour tolérer un parti islamique modéré au pouvoir. L’influence de l’empire ottoman est-elle en train de se reconstituer ? La question n’est pas tranchée.

A propos de Thierry de Montbrial :

Thierry de Montbrial dirige l'Institut français des relations internationales (Ifri) qu'il a fondé en 1979. Il est membre de l'Académie des sciences morales et politiques de l'Institut de France. Il est également fondateur et président de la World Policy Conference.

A propos de François d'Orcival :

Outre le journaliste bien connu de "Valeurs Actuelles" -dont il est président du comité éditorial - et du Figaro Magazine, ou même de LCI, François d’Orcival a été élu par ses pairs de tous les bords politiques, dès 1998, Président du Syndicat professionnel de la presse magazine et d’opinion (SPPMO). Il le reste depuis plus de dix ans.

Le Roman de l'Elysée : De la Pompadour à Nicolas Sarkozy, 2007, François d'Orcival, ed. du Rocher, 451 pages.

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