Et si on laissait les religions jouer leur rôle dans la cité ?

Le philosophe Damien Le Guay, auteur de La cité sans Dieu, appelle à un Grenelle du symbolique...
Avec Annet Sauty de Chalon
journaliste

Un Grenelle, c’est un état des lieux. Il serait bon, selon Damien Le Guay, philosophe et auteur du livre La cité sans Dieu, d’établir celui d’une société qui prétend refuser les dieux risquant ainsi la soumission à des maîtres bien plus tyranniques, le marché ou les fondamentalismes... La crise actuelle n’est pas qu’économique et sociale ; elle est aussi éthique et religieuse. La cité et les citoyens sont-ils en meilleure harmonie lorsque les religions ont une place et jouent correctement leur rôle ? Damien Le Guay, autour de rencontres avec Luc Ferry, le Cardinal Barbarin et le Grand Rabbin Bernheim, a entrepris une réflexion en profondeur qu’il détaille dans cette interview menée par Annet Sauty de Chalon.

Émission proposée par : Annet Sauty de Chalon
Référence : pag868
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Les religions sont-elles nos amies ou nos ennemies ? Pour Damien Le Guay, philosophe et critique littéraire notamment à Canal Académie, la crise de foi sévissant dans les sociétés sécularisées appelle un droit d’inventaire qu’il baptise « Grenelle du symbolique ».

En effet, constate-t-il, une laïcité combative continue d’épuiser les cœurs, de déraciner les âmes et de déboussoler les esprits, et nos contemporains se retrouvent au bout du compte vulnérables, dépressifs, à errer sur le terrain vague de la vie, sans rien qui les portent ni les unissent.

Or, dans leur coffre spirituel, les religions recèlent des trésors. Pour peu qu’on veuille en ôter les cadenas. Redécouvrir ce patrimoine, poser clairement le débat de ce qui est chez elles compatible et incompatible avec la liberté, c’est faire une œuvre salutaire.

En effet, la cité sans dieu, sorte de centre vide, ne sait que refouler le religieux, ce qui, aux yeux du philosophe, est la manière la plus sûre d’en faire émerger les pires aspects. Interroger les religions, ne pas les regarder comme des éléments exogènes et intrusifs, voilà sans doute un choix que commande la sagesse. Pour Damien Le Guay, le mot de laïcité paraît piégé et, au cours de cet entretien, il recommande de ne pas l’employer. En effet, la laïcité « à la française », bien abritée dans son écrin rationaliste, postule en fait que « seules les religions ont des certitudes ». Par conséquent, la mission de l’État consisterait perpétuellement à en canaliser les excès afin de les laisser aux marges, bien cloîtrées dans le fameux espace privé. Cette vision des choses, ou plutôt cette division du monde, se nourrit d’un sophisme, juge Damien Le Guay, car les défenseurs de ladite laïcité, loin d’une illusoire neutralité, professent tout autant des certitudes, la différence étant que celles-ci sont opposées.

Enrichie par des rencontres avec le grand rabbin Gilles Bernheim, le cardinal Philippe Barbarin et le philosophe Luc Ferry, cette manière d’aborder le sujet religieux n’esquive pas la question de l’islam, très présente au cours de cet entretien franc et profond.

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