Madame Elisabeth, la plus jeune sœur de Louis XVI

Portrait d’une grande figure de la fin de l’Ancien Régime par Jean de Viguerie, professeur des Universités
Avec Laëtitia de Witt
journaliste

Jean de Viguerie s’appuie sur une documentation inédite pour dresser un portrait riche et nuancé de la plus jeune sœur de Louis XVI dans sa biographie intitulée Le sacrifice du soir. Il met en lumière sa piété, sa vivacité d’esprit et son dévouement aux siens qui ira jusqu’au sacrifice de sa vie.

Émission proposée par : Laëtitia de Witt
Référence : hist623
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Enfance

Dernière fille du dauphin, Louis-Ferdinand et de son épouse Marie-Josèphe de Saxe, Elisabeth naît le 3 mai 1764 au château de Versailles. Dix ans la séparent de son frère aîné, le futur Louis XVI et cinq de sa sœur Clotilde, avant dernière de la famille. L’année après sa naissance, son père est emporté par la tuberculose ; sa mère le suivra dans la tombe deux ans plus tard. Orpheline à trois ans, Elisabeth reçoit pourtant une excellente éducation. Fait exceptionnel pour une jeune fille de cette époque, elle est initiée très tôt à la philosophie, plus précisément à la philosophie des stoïciens sous l’impulsion de sa gouvernante, la comtesse de Marsan. On lui inculque aussi la règle de la maison de Saint-Cyr. Elle n’en est pas l’élève, mais s’y rend souvent au cours de ses jeunes années et adopte l’esprit de la maison fait de soumission, de régularité et de sagesse. En 1774, vient s’ajouter aux leçons de Saint-Cyr, et à celles de la sagesse antique, l’instruction religieuse que lui délivre l’abbé Madier, son confesseur. Il l’initie entre autres à la dévotion du Sacré-Cœur et lui enseigne les exercices du perfectionnement spirituel, la méditation, l’oraison mentale et l’examen de conscience. Les années d’études sont l’occasion d’un réel épanouissement intellectuel mais pas seulement. D’un caractère espiègle, Madame Elisabeth est très sportive et excellente cavalière. Elle montre également de réelles dispositions pour le dessin qui témoignent de son goût plus général pour les arts.
En 1777, elle est pressentie pour épouser le frère de Marie-Antoinette, l’empereur Joseph II. Elle obtient de Louis XVI l’abandon du projet pour rester à Versailles auprès des siens. Puis vient le temps de l’indépendance avec la constitution de sa propre maison et surtout son choix de se consacrer à Dieu, sans pour autant entrer dans les ordres. Ne doit-elle pas rester disponible pour sa famille et ses amis ? Comme le montre Jean de Viguerie, cette femme qui vouait un véritable culte à la famille et à l’amitié avait pour vocation de rester avec les siens, le roi, la reine et leurs enfants.

La Révolution
- Dans les dernières années de l’Ancien Régime, Madame Elisabeth perçoit la montée du danger. Femme de caractère et réfléchie, elle se montre partisane de la fermeté et déplore parfois l’attitude de son frère. Pour elle, une chose est sure : ne jamais s’abaisser. Elle s’y appliquera. Une fois les événements en marchent, elle choisit de partager le sort de son frère et sa famille. Elle en est convaincue, il lui revient à elle de les assister et les réconforter. De Versailles à l’échafaud, elle partage tout.
Le 6 octobre 1789, elle s’installe aux Tuileries avec la famille royale. Acquiert-elle une influence morale et spirituelle sur Louis XVI ? Devient-elle sa conseillère officieuse ? Rien ne permet de le confirmer. On peut tout de même noter que dès qu’elle en a l’opportunité, elle n’hésite pas à apporter son soutien aux royalistes et sert d’intermédiaire entre eux et le roi.
- Le 20 juin 1791, elle fait partie du convoi arrêté à Varennes. Son retour à Paris aux côtés de Barnave et Pétion donne lieu à des scènes épiques. Puis c’est la résidence surveillée avant l’emprisonnement au Temple.

Le Temple

- À la prison du Temple, Madame Élisabeth continue à communiquer avec l’extérieur par différents intermédiaires dont le cuisinier ! Mais surtout, elle s’efforce d’adoucir le sort de la famille royale. Elle fait des lectures au roi, des travaux d’aiguille avec la reine, assure l’éducation du dauphin et de sa sœur, Marie-Thérèse. Le 11 décembre 1792, Louis XVI est séparé de sa famille. Il la revoit seulement le 20 janvier, veille de sa mort, pour lui faire ses adieux. Petite consolation, pendant la séparation, Elisabeth a réussi à correspondre avec son frère par l’intermédiaire du valet de chambre. En juillet 1793, c’est au tour du jeune dauphin d’être séparé de sa mère et de sa tante, quelques jours avant que Marie-Antoinette ne soit jugée par le Tribunal révolutionnaire et envoyée à la Conciergerie avant d’être exécutée le 16 octobre 1793.
A partir de la fin de l’année 1793, Élisabeth partage sa cellule avec sa nièce de 15 ans sur laquelle elle veille après l’exécution de ses parents. Elle lui inculque les valeurs chrétiennes et morales auxquelles elle est si attachée.
Douze jours après la mort de la reine, celle de Madame Elisabeth est réclamée. Suite n’est pas donnée. Trois mois plus tard, elle est finalement envoyée à comparaître devant le tribunal révolutionnaire par Fouquier-Tinville ; cela signifie la condamnation à mort.
- Le 10 mai 1794, jour de son exécution, elle est conduite en charrette à la place de la Révolution. Tout au long du trajet, elle porte secours à ceux qui sont à ses côtés. Elle est la dernière à monter sur l’échafaud. Pendant toute la durée de l’exécution de ses compatriotes elle ne cesse de réciter sa prière, De profundis. Son corps tronqué futt inhumé dans la fosse commune. Après la Révolution, sa dépouille fut placée aux catacombes de Paris avec les autres suppliciés ; un médaillon la représente à Saint-Denis.

Présentation de l'éditeur

Orpheline à l'âge de trois ans, Madame Elisabeth, la petite soeur de Louis XVI, la dernière de la famille, bénéficie pourtant d'une instruction complète. Sportive, passionnée d'équitation, excellente en mathématiques et en dessin, vive, active et rapide, elle étonne son entourage par la diversité de ses talents et la fermeté de son caractère. Avec sa maison princière et ses amies, elle forme une petite cour au milieu de la cour, y faisant régner la piété et la paix. Elle ne se marie pas, n'entre pas au couvent. Sa vocation est de rester avec les siens, le roi, la reine et leurs enfants. Dans les dernières années de l'Ancien Régime, comme avertie de la tragédie, elle se prépare pour les secourir. A partir de 1789, elle les assiste et les réconforte. Refusant de les abandonner, elle quitte avec eux Versailles pour les Tuileries, et les Tuileries pour la prison du Temple. Après le roi et la reine, elle est guillotinée. Le régime ne peut pas l'épargner. Elle est son ennemie. Elle a toujours vu dans la Révolution un mensonge et une illusion. Elle a toujours déploré la faiblesse de son frère, et n'a jamais pu y remédier. Ange consolateur, grande figure de la résistance spirituelle à la persécution antichrétienne, elle est aussi l'exhortatrice. Elle encourage ses amies à la perfection chrétienne. Dans la voiture du retour de Varennes, elle convertit Barnave à la cause du roi. Sur le chemin de l'échafaud, elle exhorte à la mort ses compagnons de supplice. Puis elle quitte ce monde sans regret, tout à l'espérance de se " retrouver dans le sein de Dieu " avec sa " famille ".

Biographie de l'auteur

Jean de Viguerie est professeur émérite des universités. Il est l'auteur de nombreux ouvrages sur l'Ancien Régime et la période révolutionnaire.

A écouter aussi avec Jean de Viguerie Le Livre noir de la Révolution française

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