La justice constitutionnelle, une innovation de la Ve République (1/2)

Entretien avec Renaud Denoix de Saint-Marc, membre du Conseil constitutionnel et de l’Académie des sciences morales et politiques

Renaud Denoix de Saint-Marc, nommé au Conseil constitutionnel en 2007, élu à l’Académie des sciences morales et politiques en 2004, consacre deux entretiens à l’histoire du Conseil constitutionnel, institution placée sous les feux de la rampe au cours de l’année 2010. Dans cette première émission, il présente les missions et les compétences du Conseil dans leur perspective historique, et les « novations » de 1971 et 1974.

Émission proposée par : Marie-Béatrice Lahorgue
Référence : ecl643
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Le Conseil constitutionnel : présentation de l’institution, de ses membres

Restitution de l’Institution dans son contexte historique : la justice constitutionnelle, une innovation de la Vème République
Nomination des membres

Les missions du Conseil : leur évolution historique

« Créée par inadvertance » (Doyen Georges Vedel) la fonction de juge constitutionnel a profondément évolué. La pratique constitutionnelle montrera que les compétences accessoires, par interprétation ou par révision, de la Constitution deviendront les principales fonctions du Conseil ainsi que le développe Renaud DENOIX de SAINT-MARC.

La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (1789).

Article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen :
La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement ou par leurs représentants à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens, étant égaux à ses yeux, sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents.

Le « légicentrisme » et la création du Conseil constitutionnel

Dans la construction de « l'État légal », sous la IIIe République, la loi est au centre de l'ordonnancement juridique : le « légicentrisme » (Louis Favoreu, Xavier Philippe, La place du Conseil dans la Constitution de 1958, site du Conseil) est la doctrine dominante jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale non seulement en France mais également en Europe.

Le sphinx du fronton du Palais-Royal, où siège le Conseil Constitutionnel.

La « révolution juridique » de 1971 et 1974

La décision fondatrice du 16 juillet 1971 (Liberté d'association) a déclenché un processus de changement profond de l'institution et de son rôle. La Constitution était dotée de deux déclarations, la Déclaration des droits de l'Homme de 1789 et le Préambule de la Constitution de 1946. C’est la création du "bloc de constitutionnalité". Un second changement intervient lors de la révision du 29 octobre 1974 permettant à soixante députés ou soixante sénateurs de saisir le Conseil constitutionnel. Enfin en 2005, la Charte de l’environnement est ajoutée à ce bloc et adossée à la Constitution (Loi constitutionnelle n°2005-205 du 1er mars relative à la Charte de l'environnement).

Le Conseil constitutionnel appartient aux cours constitutionnelles qui ont été créées en Europe après la deuxième guerre mondiale en Allemagne, Autriche ou Italie, puis en Espagne, Portugal, Belgique et se sont multipliés, après la chute du mur de Berlin, dans les nouveaux pays indépendants d'Europe centrale et orientale (L. FAVOREU, Les Cours constitutionnelles, PUF, Coll. Que sais-je ? 3è éd.). Ses neuf membres sont désignés pour un mandat de neuf ans non renouvelable, par le Président de la République, le Président de l'Assemblée nationale et le Président du Sénat, chacune de ces autorités nommant un membre tous les trois ans. Le Président du Conseil constitutionnel est désigné par le Président de la République parmi les membres nommés ou de droit.

Le Conseil constitutionnel et la hiérarchie des normes : la reconnaissance des droits fondamentaux

Quels sont les droits reconnus par le bloc de constitutionnalité français ? La loi est-elle toujours l’expression de la volonté générale ? Depuis 1974 (utilisation de la saisine parlementaire par l’opposition – 1974-1981), le contrôle de constitutionnalité des lois est devenu la principale activité du Conseil constitutionnel. A ce titre quelle est l’évolution de sa jurisprudence ?

La réforme institutionnelle du 21 juillet 2008 (adoptée à une petite majorité) et la nouvelle rédaction de l’article 39 de la constitution constituent-ils l’An 1 de la nouvelle ère législative française ?

En savoir plus :

Renaud Denoix de Saint-Marc est entré au Conseil d’État à sa sortie de l’ENA en 1964, où il a d’abord exercé les fonctions de rapporteur puis celles de chargé du centre de documentation. Directeur des affaires civiles et du Sceau au ministère de la Justice de 1979 à 1982, il a repris alors les fonctions de commissaire du gouvernement au contentieux jusqu'en 1986. A cette même époque, il est nommé secrétaire général du Gouvernement jusqu’à sa nomination comme vice-président du Conseil d’État du 23 avril 1995 au 25 septembre 2006.
Le 29 novembre 2004, il est élu membre de l’Institut (Académie des sciences morales et politiques). Il est également membre du Conseil constitutionnel, où il a été nommé le 22 février 2007 par le président du Sénat Christian Poncelet.

Le site du Conseil constitutionnel

La fiche de Renaud Denoix de Saint-Marc

À écouter aussi :
- Renaud Denoix de Saint Marc, une carrière au service de l’Etat
- La fonction de conseil en démocratie : une communication de Renaud Denoix de Saint Marc

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