Louis Braille : le jeune surdoué inventeur d’une écriture pour les aveugles

Avec le Pr Yves Pouliquen, de l’Académie française
Yves POULIQUEN
Avec Yves POULIQUEN de l’Académie française,

A 10 ans, Louis Braille entre à l’Institution royale des jeunes aveugles fondée par Valentin Haüy. Vif d’esprit, le jeune garçon met rapidement au point une écriture à la fois plus accessible et plus rapide pour les aveugles. Malheureusement, il meurt prématurément et n’a pas le plaisir de voir reconnaître officiellement sa méthode en 1854. En 1952, 100 ans après sa mort, hommage lui est rendu : sa dépouille est transférée au Panthéon. Le Professeur Yves Pouliquen, de l’Académie française, revient sur le parcours de Louis Braille, celui qui a rapproché l’aveugle du voyant.

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Louis Braille

Louis Braille perd la vue à l’âge de 5 ans, suite à un malheureux accident deux ans plus tôt, et à une infection. Issu d’une famille modeste, il a cependant la chance d’être encadré à l’école par un instituteur et un abbé dans son village à proximité de Meaux, à Coupvray. C’est grâce à eux qu’en 1819, à l’âge de 10 ans, il quitte ses parents pour l'Institution royale des jeunes aveugles fondée par Valentin Haüy.
A l’école, il apprend à lire avec des lettres en relief auxquelles Valentin Haüy reste attaché, lettres reconnues par le toucher mais dont la reconnaissance impose une lenteur incompatible avec les exigences de l’esprit.
A la même époque, on parle beaucoup du système d’écriture d’un certain Charles Barbier de la Serre (1767-1841). Capitaine d’artillerie, il a créé un mode d’« écriture nocturne » reconnaissable par un système de douze points disposés sur deux colonnes et correspondant au gré de leurs multiples combinaisons au son des voyelles ou des consonnes. Barbier avait repris un système d’écriture qui existait déjà : l’écriture punctiforme.

C’est ce procédé que cultive le jeune Louis Braille, étudiant toutes les possibilités de « son picotage ».

L’idée révolutionnaire du jeune-homme consiste à abandonner l’alphabet analogique et d’en créer un de toute pièce, par symbole ! Précisons que Braille n’a pas inventé la combinaison des points mais il a découvert leur disposition, celle qui convenait le mieux à la perception tactile de l’écrit tout en permettant une lecture globale.

Pour lui, le point ne représente plus la partie d’un trait simulant le dessin d’un caractère alphabétique ordinaire. Il s’efforce de discriminer au toucher les combinaisons de six points répartis en deux colonnes et d’en sélectionner les symboles par expérience, par tâtonnements, éliminant des alignements qui seraient possibles mais illisibles à la pulpe du doigt.

Disposer les « points braille » dans une matrice de taille convenable est pour lui fondamental. Il en résulte que pour l’aveugle les symboles braille prennent valeur d’image, « une image comparable au dessin des lettres alphabétiques appréhendées par les voyants, sans pour autant entretenir avec ces dernières une ressemblance formelle ».

Ce système est appliqué à tous les systèmes d’écriture alphabétique et à toutes les langues. C’est en 1829 que l’Institut royal publie le premier essai braille. Louis n’a alors que 20 ans. Mais l’utilisation de sa méthode n’aura lieu que 25 ans plus tard, celle de Valentin Haüy restant encore bien ancrée dans les esprits.

Les avantages de cette méthode :
- la dimension des lettres braille tombe parfaitement sous la pulpe des doigts
- elle permet de former une image instantanément sans mouvement du doigt
- c’est un gain considérable dans la vitesse de lecture

Louis Braille invente parallèlement des outils pour communiquer en braille. Tout d'abord il créé une tablette et un poinçon pour écrire facilement les lettres. Puis il invente une machine à écrire braille, et le raphigraphe, précurseur de l'imprimante à aiguille. Le raphigraphe a été utilisé pendant plus de cinquante ans avant l'apparition de la machine à écrire. Louis Braille écrit à sa famille grâce à cette machine.

Yves Pouliquen de l’Académie française, le 12 novembre 2009, Institut de France
© Canal Académie

Dès 1835, Louis Braille est atteint de tuberculose. Celle-ci l’oblige à cesser ses cours. Il ne donne plus que des leçons de musique. Il tient l’orgue de Saint-Nicolas-des-Champs et celui de Saint-Vincent, mais ce ne sera qu’un répit. Il meurt à l’Institut, le 6 janvier 1852, à l'âge de 43 ans.

Deux ans plus tard, en 1854 la France reconnaît officiellement son invention. En 1870, le braille est adapté à l’arabe, au chinois, au japonais. De nos jours, il est universellement reconnu comme le mode d’accès par excellence des personnes aveugles à la culture écrite.

En savoir plus

Yves Pouliquen de l'Académie française est professeur en ophtalmologie.

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- La maison Louis Braille à Coupvray

- Comité national pour la promotion sociale des personnes aveugles et amblyopes : CNPSAA

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