Les mathématiques au secours de la biodiversité !

Inauguration de la Chaire de Modélisation Mathématique et Biodiversité, créée par le Muséum national d’Histoire naturelle et l’Ecole Polytechnique

La toute nouvelle Chaire de Modélisation Mathématique et Biodiversité a pour but de répondre à des enjeux clés de l’environnement, tels que les niches écologiques, l’évolution adaptative, l’analyse de la dynamique des communautés et la construction de scénarios de la biodiversité. Trois discours inauguraient la création de cette chaire, écoutez-les dans cette émission.

_ L’année 2010 a été déclarée année internationale de la biodiversité par les Nations-Unies. Source d’innombrables richesses pour l’homme tels que l’agriculture, la recherche pharmacologique, l’énergie, la biodiversité est une des composantes essentielles de notre culture. A ce titre et comme le souligne Pierre-Henri Gouyon, responsable de l’équipe botanique du Muséum national d’Histoire naturelle, « la biodiversité ne se fait pas en conservant des graines dans un frigo.» En effet, celle-ci passe par le respect des organismes existants ou ayant existé. Elle garantit la diversité des écosystèmes et des espèces. Mais aujourd’hui, cette biodiversité va mal: extinctions des espèces, diminution des ressources naturelles, la prospérité de la nature s’affaiblit et laisse place à de nombreuses inquiétudes. Par exemple, Gilles Bœuf, président du CS du Muséum national d’Histoire naturelle, se questionne sur la disparition des 2/3 des espèces vivantes d’ici 2100. L’homme est le principal acteur de cette déclinaison et pourtant, comparé aux autres espèces, sa disparition est moins en danger puisque l'on prévoit d’ici les 20 ans à venir, au moins 25 villes au-dessus de 10 millions d’habitants.

Le lapin des Boschimen d’Afrique du Sud est en voie d’extinction avec moins de 250 couples reproducteurs dans la nature
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C’est donc dans un projet commun de sensibilisation et de recherche autour du thème de la biodiversité que la Fondation de l’Ecole Polytechnique en partenariat avec Veolia et le Muséum National d’Histoire Naturelle a organisé le 30 novembre 2009, le lancement de la Chaire Modélisation Mathématique et Biodiversité. Les Mathématiques Appliquées et l’écologie se sont donc alliées pour tenter d’apporter une nouvelle force dans l’étude de l’environnement. En quoi les mathématiques peuvent être utiles à l’écologie ? Serait-on en droit de se demander. La modélisation mathématique a pour objet la simulation du comportement d’une certaine population ou de certains systèmes biologiques. En modélisant le monde, c’est-à-dire en le représentant, elle permet la création d’outils qui facilitent de meilleures prises de décision. La création de cette Chaire Modélisation Mathématique et Biodiversité revêt une importance particulière « car elle permet d’approfondir le concept même de biodiversité », comme l’a rappelé Denis Couvet, directeur de l’unité de Conservation des Espèces au Muséum national d'Histoires naturelle à l’entame des conférences. « Cette chaire va permettre la construction de scénarios de biodiversité […].L’interprétation des données permet de comprendre l’impact des politiques passées mais ce qui nous apporte encore plus, c’est l’impact des politiques présentes, discutées actuellement et donc on a besoin de construire des scénarios.» a-t-il rajouté.

L’impact de la population humaine est donc immense sur l’environnement. C’est sur ce point que revient Gilles Bœuf avec le premier discours du cycle de conférences scientifiques, intitulé « vous avez dit… biodiversité ? Quels besoins mathématiques?» Dans un premier temps, le président du CS du Muséum national d’histoire Naturelle se propose de définir ce qu’est la diversité biologique. Une définition qui ne s’arrête pas qu’au recensement des espèces. « C’est beaucoup plus que ça, c’est la totalité des relations établies entre les espèces d’un milieu entre elles et dans toute sa complexité. Par exemple, l’étude d’une espèce : l’homme et ses relations avec un milieu donné: Paris. »

Gilles Boeuf, Président du Muséum national d’histoire naturelle, prévient : "On enregistre une disparition d’espèce vivante toutes les 20 minutes".
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_ Dans son discours que nous vous proposons d’écouter, Gilles Bœuf revient sur l’influence de l’homme sur la biodiversité en ce sens qu’il est, avec son cortège d’activités, le plus puissant moteur de l’évolution. En notant que 20% des humains consomment, à l’heure actuelle, 80% des ressources de la planète, Gilles Bœuf met en avant les besoins mathématiques pour améliorer la Recherche sur la biodiversité et donc le meilleur respect de celle-ci. Comment quantifier les espèces si cela est seulement possible ? Comment organiser la résistance d’un écosystème aux agressions ? Autant de questions auxquelles Gilles Bœuf apporte son éclairage et son optimisme.

- Sandrine Pavoine s’occupe du département écologie et gestion de la biodiversité au Muséum National d'Histoire Naturelle. Elle évoque ici le double objectif pour des mesures complexes de biodiversité : écologie des communautés et conservation. D’après des études menées sur une communauté de papillons au sud de la Belgique et au nord de la France, puis sur une communauté de poissons marins en Californie, Sandrine Pavoine dresse un constat. Insistant sur la nécessité d’établir plusieurs critères de mesure pour capturer tous les aspects de la biodiversité ; Compétition entre les espèces, comment les espèces s’associent-elles à certains environnements? On comprend alors pourquoi certains lieux sont plus riches que d’autres en matière de biodiversité. Son étude s’intéresse également aux espèces avec une originalité phylogénétique (la salamandre de Chine ou encore le lapin d’Afrique du Sud) c’est-à-dire les espèces issues d’une longue branche de l’évolution, qui sont plus menacées et demandent donc plus de mesures de conservation.

Nicolas Champagnat de l’Insitut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA)
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- Nicolas Champagnat, de l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA) livre ici une conférence dont le thème est le suivant : Ecologie et évolution aux sources de la diversité : une analyse mathématique du branchement évolutif.
Il nous présente ses travaux sur les différents processus évolutif par lesquels de nouvelles espèces vivantes apparaissent. De nouvelles espèces peuvent voir le jour à partir d’une espèce de base et ce dans un même lieu, sans isolement géographique. C’est ce que l’on nomme la spéciation sympatrique. Par opposition, l’apparition de nouvelles espèces peut se faire malgré une séparation géographique. Apparaitra alors un arrêt des échanges génétiques au sein de l’espèce. C’est le phénomène de la spéciation allopatrique. En s’appuyant sur différents exemples tels que les poissons ou les insectes phytophages, Nicolas Champagnat expose ses études mathématiques.
Le principe des dynamiques adaptatives est l’étude de modèle qui tiennent compte des interactions entre évolution et écologie, c’est une théorie dont le principe est de construire un paysage avec des capacités reproductrices et à partir des paramètres écologiques du paysage, de l’analyser afin de décrire l’évolution à long terme de la population. Il explique également le processus de mutation d’une espèce et la fixation de cette mutation.

En savoir plus :

- Chaire de Modélisation Mathématique et Biodiversité :

- Site du Muséum National d’Histoire Naturelle :

- Prochaine rencontre de la Chaire Modélisation Mathématique et Biodiversité, le 25 mars 2010 à partir de 13h30 au Muséum National d’Histoire Naturelle (salle de géologie) sur la Modélisation de la sélection inter-phylétique.

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