Le sang des Bourbons : mort du roi et naissance de la République

Avec l’historienne Marie-Hélène Baylac
Avec Anne Jouffroy
journaliste

Le 10 août 1792, les « patriotes », qui réclament la déchéance de Louis XVI, prennent d’assaut le château des Tuileries, pénètrent dans la cour, fraternisent avec une partie des défenseurs, mais les Suisses contre-attaquent. C’est le massacre : 413 morts du côté des assaillants, 1000 dans les rangs des défenseurs. C’est aussi la naissance d’un mythe qui va justifier en partie l’exécution du roi : Louis XVI a attiré le bon peuple pour le faire égorger, procédant à une nouvelle « Saint-Barthélémy », le massacre de la Saint-Laurent. Explications en compagnie de Marie-Hélène Baylac.

Émission proposée par : Anne Jouffroy
Référence : pag684
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Marie-Hélène Baylac

Marie-Hélène Baylac, agrégée d’Histoire, parle de son dernier livre Le Sang des Bourbons paru chez Larousse. Du 10 août 1792 au 21 janvier 1793 c’est la marche sanglante vers la République.

Avant l’assaut, les autorités départementales ont convaincu le roi de se rendre, avec sa famille, dans la salle du Manège, où siège l’assemblée législative. Sous la pression des insurgés, les 284 députés présents (sur 745 élus) suspendent Louis XVI de ses fonctions et décident l’élection d’une convention pour prendre les mesures destinées à « assurer la souveraineté du peuple. » Le 13 au soir, la famille royale est emprisonnée au Temple.
C’est le début du processus qui conduit à l’instauration de la République, une république née de l’abolition de la royauté, le 21 septembre 1792, mais, plus encore, de l’exécution du roi le 21 janvier 1793. Car, pour les radicaux, « Louis ne peut être jugé, il est déjà condamné, il est condamné ou la République n’est point absoute. » (Robespierre)

En puisant aux sources les plus diverses - documents officiels, mémoires des protagonistes du drame, presse patriote - tant les sources d’où émergent la figure du roi tyran que celles qui sont à l’origine de la figure du roi martyr – l’auteur faire revivre cet épisode majeur de l’Histoire de France. S’en dégagent quelques temps forts :

Les prisonniers assassinés

- Le 2 septembre, dans un climat de peur provoqué par la chasse au complices du roi et par l’invasion de la France par les armées austro –prussiennes, les radicaux lancent l’idée qu’il faut purger les prisons des conspirateurs qui s’apprêtent à en sortir pour délivrer Louis XVI et massacrer les patriotes.En cinq jours, une centaine d’hommes (peut-être 300), massacrent 1300 prisonniers, terrorisant pour de longs mois la majorité silencieuse.

la royauté abolie

- Le 20 septembre, la Convention se réunit. Le lendemain, les 371 députés présents (sur 749 élus) abolissent la royauté par acclamation, sans même en débattre. « Qu’est-il besoin de discuter quand tout le monde est d’accord . Les rois sont dans l’ordre moral ce que les monstres sont dans l’ordre physique. » (L’abbé Grégoire). On décide que désormais les actes publics seront datés de l’an I de la République.

Le jugement du citoyen Capet

- Le 2 décembre, la Convention décrète qu’elle jugera « le citoyen Capet ». Le souverain déchu comparait à deux reprises, le 11, puis le 26 décembre. Sa défense est maladroite. Il rentre au Temple, convaincu que « la lutte est terminée. » Ses partisans espèrent pourtant lui épargner le châtiment suprême en prévoyant de faire appel au peuple de la décision de la Convention.

La mort du roi : une voix de majorité

- Le 14 janvier 1793, les opérations de vote débutent. Chaque élu vient énoncer à la tribune son choix et peut le motiver.
A la première question – « Louis est-il coupable ? » - , 643 députés sur 721 répondent « oui », sans surprise.
On passe aussitôt à la seconde question : « Votre décision sera-t-elle soumise à la ratification du peuple ? » 424 députés se prononcent contre l’appel au peuple. L’argument des radicaux a porté : en appeler au peuple, ce serait risquer d’ouvrir une guerre civile. C’est la consternation chez les défenseurs de Louis XVI.
Enfin le 16 au soir, débute le dernier vote : « Quelle peine Louis a-t-il encourue ? » L’opération dure toute la nuit et toute la journée du lendemain, dans un climat de tension extrême. La mort sans condition ne l’emporte qu’à une voix de majorité.

- Le 21 janvier, à 10 h 22, la tête du roi tombe. Les chefs de file montagnards et la presse saluent l’exécution comme l’acte fondateur de la République :
« La tête du tyran vient de tomber sous le glaive de la loi ; le même coup a renversé les fondements de la monarchie parmi nous ; je crois enfin à la république. » (Marat)
« Le sang de Louis Capet, versé par le glaive de la loi, nous lave d’une flétrissure de treize cent années. Ce n’est que depuis lundi que nous sommes républicains. » (Prudhomme)

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