Le monde quantique au quotidien : la micro et opto-électronique

Par Emmanuel Rosencher, Directeur scientifique de la branche physique à l’Office National d’Etudes et de Recherches Aérospatiales (ONERA)

La mécanique quantique, est un cercle vertueux qui lie une discipline scientifique au bouleversement technologique dont sont issus Internet, les ordinateurs, les téléphones portables... De Thomas Young au XIXe siècle aux potentielles applications des térahertz aujourd’hui, Emmanuel Rosencher revient sur les prémices de la mécanique quantique et ses applications actuelles.

Cette communication avait lieu dans le cadre des conférences inaugurales de l’Ecole Nationale des Ponts et Chaussées à la rentrée 2009.

Emmanuel Rosencher a choisi de débuter son exposé par la remise en question de la nature corpusculaire de la lumière en 1803 par Thomas Young.
A l'époque, le britannique fait passer un faisceau lumineux à travers un deuxième écran, percé de deux trous relativement proches l’un de l’autre. Il regarde l’image projetée ce cette source lumineuse sur un écran et observe des granges périodiques noires et claires, qui ne peuvent pas s’expliquer par un formalisme corpusculaire.

Sa déduction bouleverse la science à cette époque : la lumière est une onde.

Augustin Fresnel ajoutera à cette déduction une autre information capitale : ces champs électriques s’ajoutent et forment un espace vectoriel.

Comme l’œil, la plaque photographique et les caméra ccd des téléphones portables sont des détecteurs quadratiques. Ils détectent les carrés des champs électriques.
Fresnel expliquait alors à l'époque que ces interférences étaient dues à l’additivité des champs électriques.

Heinrich Rudolf Hertz (1857-1894)

Premier trouble-fête : Heinrich Hertz

Heinrich Hertz réalise l'expérience suivante : il prend deux plaques métalliques, les mets dans une enceinte à vide et applique une tension. Rien ne se passe en l’état.
Hertz a alors l’idée d’éclairer les plaques avec des ondes rouges. Aucun courant ne passe. Il décide dans un second temps d’envoyer de la lumière bleue. Et là, le courant passe !
Conclusion de Hertz : Il semble y avoir un rapport entre l’énergie des électrons qui sont émis et la fréquence de la lumière excitatrice. En mesurant l’énergie émise, il constate que plus la longueur tend vers le bleu, plus l’énergie des électrons est élevée.

Deux autres trouble-fête : Maxwell et Lord Rayleigh

James Clerk Maxwell (1831-1879)

« Quelle est l’énergie émise par ces corps noirs, en fonction de la longueur d’onde ? »
En utilisant les théories mécaniques, Maxwell et Lord Rayleigh pensent que plus la lumière a une longueur d’onde faible, plus l’intensité de lumière doit être importante.

Max Planck y met alors lui aussi son grain de sel : « Pour comprendre ça, je dois admettre que la lumière est faite d’excitation. Chaque excitation individuelle a une énergie, le quantum d’énergie. »

La lumière arrive en paquet d’énergie, et l’énergie de chaque paquet est le produit de la fréquence par une constante. En calant cette théorie sur les résultats expérimentaux, Max Planck trouve une valeur h, (la constante de Planck) en joule par seconde. La valeur est très faible.
On ne parle pas encore de photon pour l’instant. Le terme quantique n'a pas encore été inventé.

John William Strutt Rayleigh (1842-1919)

A la fin du XIXe siècle, Lord Rayleigh affirme que « toute la physique est établie. Il reste à comprendre le spectre du corps noir et l’effet photoélectrique ».

Arrive alors Albert Einstein qui va sentir que les deux effets sont les mêmes.

Le génie d'Albert Einstein

« Ceci prouve la nature ondulatoire de la lumière » explique Albert Einstein.
Les quantums d'énergie de Max Planck sont des particules, les particules collisionnent les électrons qui sont dans le métal, et promeuvent les électrons à des énergies supérieures.

Tout l’effet photoélectrique s’explique bien poursuit-il : « Si vous avez une quantité considérable de photons qui ont une fréquence trop faible, il ne se passera rien. En revanche, le moindre filet de lumière bleu, va avoir assez d’énergie pour céder les photons à des électrons et les envoyer dans le vide.
Pour le vérifier, mesurez l’énergie des électrons émis dans le vide, en fonction de la fréquence. Je vous parie que vous trouvez h ! »

Einstein avait vu juste. La mécanique quantique vient de naître.

Écoutez l'intervention d'Emmanuel Rosencher lors de sa conférence inaugurale à l'Ecole Nationale des Ponts et Chaussées à la rentrée 2009.
Il revient sur le rôle d'autres scientifiques dans le développement de la mécanique quantique, tels que Louis de Broglie, Bardeen, Shockley, Brattain, Erwin Schrödinger, ou encore John von Neuman.

Le scan avec la technologie téraHertz permet de voir à travers les vêtements. Le développement de cette technologie est en plein essor

La dernière partie de son intervention est consacrée aux applications de la mécanique quantique, sur la découverte de l’électroluminescence de GaN dans le bleu, le lecteur de disque compact CD et DVD et sur les frontières de la mécanique quantique, avec la nano-électronique, les téraHertz (intermédiaire entre les fréquences radioélectriques des micro-ondes et les fréquences optiques de l'infrarouge), les atto-secondes, les ExaWatts, les états intriqués et la cryptographie quantique.

Emmanuel Rosencher à l’ENPC

Emmanuel Rosencher est ancien élève de l' École Polytechnique et de l’ENST, il est directeur scientifique de la branche physique à l’Office National d’Etudes et de Recherches Aérospatiales (ONERA).

En savoir plus :

- [ENPC, Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, page de présentation de la conférence d'Emmanuel Rosencher
->http://www.enpc.fr/fr/ftp2/conf_2009/conf_inaug_rosencher.htm]

- ONERA, Office National d’Etudes et de Recherches Aérospatiales
- Emmanuel Rosencher

Ecoutez également les conférences inaugurales :
- d'Alain Prochiantz : La "Machine esprit"
- d'Yves Jeanneret : Communication des savoirs, savoirs de la communication

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