La joie selon Alfred Grosser

avec Alfred Grosser, sociologue
Avec Hélène Renard
journaliste

Dans un monde où bien des choses vont mal, parler de la joie est-il paradoxal, voire déplacé ? C’est la question posée à Alfred Grosser, l’un de nos meilleurs sociologues français, qui méditait ce thème dans le Forum du quotidien national La Croix.

Émission proposée par : Hélène Renard
Référence : ecl533
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Dans sa chronique dans La Croix, intitulée « les souffrances et la joie », Alfred Grosser s'interroge sur la justification que nous, nantis que nous sommes, privilégiés du bien-être et de l’accès aux soins, avons à parler de la joie.

Il se remémore un moment important de sa vie, un 1er janvier 2003, tandis qu'il écoutait la neuvième symphonie de Beethoven : L'ode à la joie. L’hymne européen le reprend (composé par Beethoven sur un livret de Schiller). Est-ce pertinent ?
Il se souvient aussi -c'était en 1969- de ce magnifique ballet de Maurice Béjart qui fait comprendre que l'homme en souffrance se libère grâce à l'aide d'une femme. Ils se dressent tous deux dans la joie, rejoints par d'autres couples et tous ensemble peuvent alors entrer dans le dernier mouvement, celui de l'Ode à la joie justement.
Puis il commente en quelques mots la joie dans d'autres oeuvres : de Paul Claudel, l’Annonce faite à Marie, et de Roger Martin du Gard, les Thibault. Et deux opéras : Fidelio, l’unique opéra de Beethoven, et Faust de Gounod.

Pour Alfred Grosser, la joie est liée à l’action, et particulièrement à l’engagement vers les autres. Elle est altruiste. Il écrit : "la joie est un sentiment qui prend en compte l’autre pour ne pas l’abandonner". Il écrit aussi « la joie est bienfaisante par elle-même » et certains ont pour mission ou pour vocation d’être des transmetteurs de joie, notamment, dit-il, les enseignants et les prêtres. Pour lui qui fut enseignant toute sa vie, ce fut vraiment une joie.

Alfred Grosser, politologue, sociologue et historien français d’origine allemande né en 1925 à Francfort-sur-le-Main


Enfin, Alfred Grosser explique que la joie n’est pas dans les plaisirs. Et surtout pas dans les plaisirs égoïstes. Notre société pousse trop aux plaisirs superficiels. Il souligne que l’amoralité ambiante n’apporte pas la joie.

Par contre, et c'est réconfortant : « Tout minuscule changement que chacun de nous peut apporter au désordre de ce monde est source de joie ».

La chronique « les souffrances et la joie » est paru dans le Forum de La Croix du janvier 2009.

Principales étapes de la carrière d'Alfred Grosser :

Il a durant toute votre vie, enseigné, professeur à l’institut d’études politiques de Paris, Sciences Po, à l’Ecole polytechnique, à l’Ecole des hautes études commerciales HEC et également dans les grandes universités étrangères, à Stanford aux Etats Unis, à Tokyo, à Singapour.

Il a publié de nombreux ouvrages consacrés à l’Allemagne, aux institutions politiques, à l’Europe et il a tenu des chroniques régulières dans les journaux, Le Monde, et aujourd’hui encore dans La Croix (où il a commencé en 1955 !) et dans Ouest-France.

Ses travaux, son enseignement, ses publications, ont largement contribué à une meilleure connaissance de l’Allemagne par les Français et à la coopération franco-allemande, indispensable au sein de l’Europe.

Ajoutons que, parmi de nombreuses distinctions, il reçu le Grand prix de l’Académie des sciences morales et politiques, en 1998.

Henri Matisse, La joie de vivre
Toile 175 x 241 cm (1905-1906)

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