Les mots des religions : le discernement

avec le Grand Rabbin Haïm Korsia
Avec Hélène Renard
journaliste

Pourquoi Salomon demande-t-il à Dieu l’esprit de discernement ? Il aurait pu demander la richesse, la victoire, la gloire et autres satisfactions. Non. Il demande que Dieu lui donne le discernement, c’est- à-dire la sagesse, la capacité de comprendre l’autre et l’intelligence de la situation. Le Grand Rabbin Haïm Korsia développe ici cette notion fondamentale.

Émission proposée par : Hélène Renard
Référence : tor508
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Dieu demande en fait à Salomon quel type de royauté il entend imposer : une royauté fondée sur la force ? sur la peur ? sur la magnificence ?
Salomon répond : une royauté fondée sur la justice.
Or, le discernement permet de comprendre l'autre et donc de l'aimer.
Or, comment le juge, qui tient sa justice de Dieu- peut-il aimer qui il va juger ?
La justce est l'un des noms de Dieu. On remarque que lorsque Dieu crée le monde, tant qu'il n'a pas créé l'Homme, il porte le nom de Justice. Mais dès qu'il a créé l'Homme, son nom devient Miséricorde. Et de fait, l'Homme, faillible par définition, ne saurait vivre sans la miséricorde de Dieu.
Salomon voulant établir une royauté de justice demande donc la capacité de discerner, de comprendre les motivations des uns et des autres, les aléas de leur vie qui les ont poussé à agir de telle ou telle façon.

Comme le coq discerne le jour de la nuit...

Il est une prière que les Juifs récitent tous les matins, une prière de bénédictions : remercier Dieu qui donne souffle de vie, qui permet de se vêtir, de se nourrir, de se lever, d'espérer, etc. (une prière que l'on comprend surtout quand on manque de tout cela...)
Et l'on ajoute : merci à Toi qui donnes "au coq le discernement du jour et de la nuit".

Comment comprendre ce discernement-là ?
L'Homme, après avoir mangé de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, doit maintenant apprendre à discerner le bien et le mal, aussi facilement que le coq discerne le jour et la nuit. Mais entre les deux, existe une zone intermédiaire, le crépuscule, une zone grise où nous ne savons plus très bien où est le bien et où est le mal...

Le jugement de Salomon par Nicolas Poussin.


L'absolu perfection nuit au discernement

Dans le Talmud, le texte s'interroge sur la courte durée de la dynastie du roi Saül qui était pourtant un homme pur et parfait. Mais trop parfait. La pureté absolue empêche le discernement.
Le Talmud précise : un chef doit toujours avoir derrière lui un "panier de serpents" (on dirait : quelques défauts ou manquements) pour éviter qu'il n'écrase les autres de sa morgue. Un chef trop absolu ne saurait plus discerner la théorie de la réalité de la vie.

Le Talmud précise également qu'un juge ne doit pas être trop vieux. Pourquoi ? Parce qu'il aurait oublié la difficulté qu'il y a, pour certains, à nourrir ses enfants... Autrement dit, il doit avoir le discernement nécessaire pour arbitrer entre l'absolu de la loi et les difficultés de la vie. Le discernement est nécessaire à la compréhension d'autrui.

Le Grand Rabbin Haïm Korsia, aumônier israélite des armées françaises, révèle que, récemment, un grand travail de réflexion a été mené au sein de la police française, dans un cursus de formation, autour de la notion de discernement.

Le discernement permet donc l'intelligence de la situation.

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