Le maréchal André Masséna, duc de Rivoli, prince d’Essling (1758-1817)

"L’enfant chéri de la victoire"
Avec Laëtitia de Witt
journaliste

Stratège de génie ou militaire chanceux ? Dans la série de portraits consacrés à la campagne espagnole de Napoléon Ier, François Malye, grand reporter au Point et auteur de Napoléon et la folie espagnole, présente un des célèbres maréchaux de l’Empire, le maréchal André Masséna.

Émission proposée par : Laëtitia de Witt
Référence : hist314
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Premiers lauriers
Né à Nice le 17 mai 1758, André Masséna est issu d’une famille de commerçant. Orphelin de bonne heure, il s'engage à 17 ans dans l'armée française. N’étant pas noble, il ne peut dépasser le grade d'adjudant et finit par se retirer peu avant 1789. Quand la Révolution survient, il se porte volontaire sans hésiter et atteint dès 1793 le grade de général de division. Sa contribution à la victoire de Rivoli, en 1797, lors de la première campagne d'Italie, lui vaut du commandant de l'expédition, Napoléon Bonaparte, le surnom d'«enfant chéri de la victoire». Il s'illustre un peu plus tard à la tête de l'armée d'Helvétie, en remportant la victoire de Zurich sur les troupes russes de Souvarov. Après le 18 Brumaire, il perd son commandement, peut-être pour ne pas avoir approuvé le coup d’Etat. Il est ensuite envoyé en Italie. Les Autrichiens coupent l’armée en deux, et Masséna doit se réfugier à Gênes, en avril 1800. Après trois mois de siège, il capitule le 4 juin 1800. Sa résistance lui permet d’évacuer la ville avec les honneurs de la guerre, mais il est disgracié. Il se retire à Rueil. Devenu député en juillet 1803, il vote contre le consulat à vie. Il fait tout de même partie de la première promotion de maréchaux en mai 1804. L’année suivante, Napoléon le rappelle au commandement de l’Armée d’Italie. Masséna prend Vérone et occupe les troupes de l’archiduc Charles tandis que Napoléon marche sur Vienne.

Sous l'Empire
En 1806, il est chargé de conquérir le royaume de Naples, dont Joseph devient roi. En 1807, Napoléon le fait duc de Rivoli puis prince d'Essling, après sa victoire de 1809. Il demande alors un congé soi-disant pour raison de santé, c’est aussi un moyen pour s’éloigner du pouvoir.

En effet, ses rapports avec Napoléon sont houleux. Pourquoi une telle animosité de la part de l’Empereur ? En fait, tout oppose les deux hommes. Masséna, figure des guerres de la Révolution, n’a jamais admis la façon dont Napoléon s’est emparé du pouvoir. Jacobin dans l’âme, il le restera toute sa vie. Mais surtout, sa gloire militaire encombre l’Empereur. A Sainte-Hélène, Napoléon vantera ses talents militaires « devant lesquels il fallait se prosterner » tout en l’accusant de manquer de caractère et surtout de ne pas avoir les qualités d’un vrai chef. Il lui est souvent reproché d’être incapable de se faire aimer de ses soldats. Quelle en est la raison ? Sa rapacité légendaire. Comme bon nombre de ses contemporains, Masséna est l’auteur de nombreux pillages. Faiblesse dont Napoléon se servira sans cesse pour rabaisser l’homme. Toujours est-il qu’en 1810, le maréchal reçoit le commandement de l’armée du Portugal.

En Espagne
Pourquoi avoir choisi Masséna ? Tout simplement, parce qu’il est un des rares grands capitaines auquel Napoléon reconnaît de réelles qualités de stratège. Sa mission est claire : envahir le Portugal et reprendre Lisbonne aux britanniques. Masséna n’est pas enchanté par cette proposition. Sur le plan physique, il n’est plus jeune, 52 ans, et craint la tuberculose. Mais surtout, il pressent que cette guerre d’Espagne est la première marche vers l’abîme.

Il rejoint l’Espagne en juillet 1810. Homme à femmes, il part accompagné de sa maîtresse, Henriette Leberton. Ney et Junot, placés sous les ordres de Masséna, ne supportent pas cette présence féminine, dont ils se servent pour accabler le maréchal. Elle sera aussi la cause d’erreurs stratégiques de la part de Masséna. Arrivé en Espagne, il tente de réorganiser une armée qui manque de tout et réduite à 50 000 hommes. Comptant sur les renforts promis par l’Empereur, il part pour le front. Le 10 juillet, après avoir pris Ciudad-Rodrigo (Espagne), il entre au Portugal et se heurte à Wellington, et à ses fortifications de Torres-Vedras le 27 juillet. Les discordes du commandement français ajouté à un manque total de renseignement rendent ce siège pénible. La prise d'Almeida, en territoire portugais, le 29 août se fait également dans des conditions difficiles. Masséna espère encore des renforts qui ne viendront pas. Sans renforts, sans munitions, sans provisions, il finit par battre en retraite en 1811. Il est remplacé par Marmont. Pour la dernière fois, il connaît la disgrâce de Napoléon, ses dernières déprédations n’ayant rien arrangé. Il ne reverra plus le champ de bataille.

Une triste fin
Gouverneur militaire à Marseille, il reste en fonction à la première Restauration. Pendant les Cent-Jours, son ralliement à l’Empereur lui coûte sa place de commandant de la Garde nationale de Paris. Il meurt deux ans plus tard, à 59 ans, oublié de tous.

Bibliographie
- Frédéric Hulot, Le maréchal Masséna. Ed. Pygmalion, janvier 2005.
- Jean-René Aymes, L'Espagne contre Napoléon. La guerre d'indépendance espagnole 1808-1814. Paris, Nouveau Monde éditions, Fondation Napoléon, 2003.
- François Malye, Napoléon et la folie espagnole. Paris, Tallandier, 2007.

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