Jean-Robert Pitte : "Le vin et la condition humaine"

En séance de l’Académie des sciences morales et politiques lundi 12 décembre 2011
Jean-Robert PITTE
Avec Jean-Robert PITTE
Membre de l'Académie des sciences morales et politiques

Le vin est bon pour tout : l’économie française mais aussi le dialogue entre les cultures, pour la santé et pour le plaisir ! A condition bien sûr de le déguster sans excès et non de l’interdire... Jean-Robert Pitte, élu à l’ASMP, en 2008, au fauteuil précédemment occupé par Pierre George, dans la section Histoire et géographie, a donné devant ses confrères académiciens une communication sur le vin le lundi 12 décembre 2011, intitulée : Le vin et la condition humaine. Grâce à vin, l’humanité n’est pas tout à fait désespérante !

Jean-Robert Pitte, d'emblée, admet que traiter d'un tel sujet devant une compagnie d'académiciens pourrait paraître futile... Il n'en est rien. Sa manière d'aborder le vin tient en effet à la fois de l'histoire, de la géographie, de l'économie et même de la médecine et de la psychologie.

Quelques chiffres tout d'abord :
- 40 % des Français ne boivent pas de vin
- 30 % n'en boivent que les jours de fête
- et seulement 30 % en boivent tous les jours.

Reste que les Français demeurent les premiers consommateurs de vin au monde, immédiatement suivis des États-Unis, puis de l’Italie et de l’Allemagne, talonnés par l’Espagne, le Royaume-Uni, l’Argentine et la Chine. Très vite, les États-Unis et la Chine seront les premiers consommateurs de la planète, au moins en volume global. La consommation par tête nous place en deuxième position derrière le Luxembourg (48 litres par an, contre 53). À titre de comparaison, chaque Américain en boit 9 litres, chaque Japonais 2 litres et chaque Chinois 1 litre). Pour compléter ce bref panorama économique, Jean-Robert Pitte rappelle que les exportations de vins français et eaux de vie de vin représentent 10 milliards d’euros, soit l’équivalent de 182 Airbus ou de 405 rames de TGV, ainsi répartis : 2,5 milliards pour le champagne, 1,7 pour le cognac, 1,4 pour le bordeaux et 700 millions pour le bourgogne. Et l'intervenant de conclure ainsi ses propos introductifs : « On le voit, dans la période de crise que nous traversons, le vin est un produit sérieux, il est à notre économie ce que le pétrole est à d’autres, avec une qualité supplémentaire : celle de porter l’empreinte de notre culture, pour ne pas dire de notre génie, celle de nous ressembler ».

Jean-Robert Pitte se propose donc d'évoquer « quelques unes des éminentes vertus du vin sans lequel l’humanité serait encore plus désespérante et désespérée qu’elle n’est » ...

Et tour à tour, il va expliquer comment le vin est l'expression de la vie, comment les 5 sens sont concernés par la dégustation de ce breuvage quasi divin, pourquoi ses vertus euphorisantes engendrent la joie de vivre, et surtout comment boire du vin exige un sens des responsabilités : « Je reviens aux risques réels que fait courir le vin bu à l’excès. Leur existence n’est évidemment pas une raison de mettre en œuvre le principe de précaution, la culpabilisation et l’interdiction de la consommation, mais au contraire l’occasion d’inviter chacun à exercer son sens des responsabilités, à connaître sa capacité et à pratiquer la tempérance hors de laquelle, quelle que soit son activité, l’homme s’avilit et prend le risque d’attenter à la dignité, voire à la vie d’autrui ».

Les Buveurs de vins de Jacques Autréau (Musée du Louvre)


Autre qualité du vin soulignée par Jean-Robert Pitte : il contribue au "vivre ensemble" car le vin est au cœur du dialogue des civilisations : « L’expansion mondiale de la culture occidentale, d’essence chrétienne, au cours des cinq derniers siècles, a permis la diffusion de la viticulture partout où cela est possible, mais aussi du goût du vin, à l’exception des pays musulmans. Encore faudrait-il nuancer, tant les vins du Maroc ou de Tunisie ont récemment progressé en qualité. De nombreux peuples ont appris à connaître et à aimer le vin. Au cours de ces dernières décennies, ce sont les pays non producteurs de l’Europe et de l’Amérique du nord (Scandinavie, Russie, Canada), le Japon, la Corée, Singapour et, désormais, la Chine, l’Inde et bien d’autres pays. L’ouverture de bars à vin, d’écoles de sommellerie et de dégustation, l’explosion éditoriale dans tous ces pays va de pair avec l’émergence d’une proportion non négligeable de la population qui connaît les vins, les producteurs, les millésimes et demande le meilleur que ses moyens lui permettent de s’offrir. Les domaines les plus réputés de France et d’Europe exportent la plus grande partie de leur production. Il ne faut le regretter ni pour notre balance commerciale, ni pour le dialogue interculturel qu’ils permettent. Boire du vin ensemble aujourd’hui, moderne avatar du symposium grec, c’est entrer en communion et c’est la meilleure garantie d’une paix durable entre les peuples qui apprennent ainsi à mieux se connaître et s’apprécier ».

Dans cette émission, vous pouvez écouter l'intégralité des propos de Jean-Robert Pitte et sur le site de l'Académie, vous pouvez en lire le texte : www.asmp.fr

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