Horloge biologique : mettez-vous à l’heure !

avec Yvan Touitou, membre de l’Académie nationale de pharmacie

Comment mettre à la bonne heure notre horloge biologique ? On estime qu’un être humain passe le tiers de sa vie à dormir. Difficile à croire pour ceux qui rencontrent des problèmes de sommeil, en premier lieu les travailleurs de nuit, le personnel naviguant des compagnies aériennes, les aveugles ou encore les personnes âgées. Comment s’expliquent ces dysfonctionnements des rythmes biologiques et comment y remédier ? Réponses en compagnie d’Yvan Touitou.

Notre horloge biologique est en réalité un ensemble de plusieurs horloges. Celle que nous connaissons le mieux se situe dans notre hypothalamus. Mais d'autres organes, tels que les reins et le foie, hébergent des horloges complémentaires de la première.

Synchronisation des horloges :

Attention ! Les facteurs environnementaux (jour/nuit, travail/repos) ne génèrent pas notre rythme biologique. Ils ne font que l’encadrer, sur une période de 24 heures.

La structure temporelle résulte probablement d’une adaptation des espèces aux variations périodiques et prévisibles de l’environnement liées à la rotation de la Terre sur elle-même en environ 24 heures. Le maximum des performances du système nerveux, des muscles, du cœur, des poumons se situe vers le milieu de la journée. Les pics des activités endocriniennes qui préparent les activités diurnes cérébrales, neuro-motrices, apparaissent la nuit. La Recherche n° 132, avril 1982


Les soucis de dysfonctionnements de rythmes biologiques interviennent le plus souvent :
- en cas de suppression des indicateurs de temps. Cela concerne une grande partie des aveugles, qui n'ont pas totalement la notion de jour et de nuit.
- lorsque l'activité humaine est en décalage avec les rythmes naturels. Ce cas concerne le travail posté, le travail de nuit mais aussi le personnel naviguant des compagnies aériennes. Certaines personnes s'accommodent du travail de nuit, et du travail posté (3x8). Mais l'adaptation est variable selon chaque individu. Certains deviendront intolérants au travail de nuit après plusieurs années de travail, d'autres seront intolérants dès les premiers jours ; enfin une dernière catégorie s'adaptera sans aucun problème.
- en cas de désordres circadiens qui dépendent du cadre social et environnemental. Le rythme circadien est en roue libre.

Les symptômes observés sont des hausses de température, une augmentation de la pression artérielle, une baisse de la sécrétion de mélatonine, des troubles de l'humeur, une perte d'appétit et une fatigue persistante.

Durées moyenne de sommeil à différentes étapes de la vie


Un lien entre dépression et horloge biologique ?
La preuve n'est pas formelle, mais il a été constaté que certaines dépressions trouvaient leurs origines dans les gènes qui régulent notre horloge biologique.

De même plusieurs études tendent à montrer un lien entre les dysfonctionnements de l'horloge biologique et les cancers hormono-dépendants tels que le cancer du sein, des ovaires ou de la prostate.
Parmi les études épidémiologiques, l'une d'entre elles portait sur 65 000 infirmières travaillant de nuit. Les résultats ont montré un risque multiplié par 70 de déclarer un cancer.

Pourquoi dormons-nous moins avec l’âge ?
Il semble qu'après étude des sujets âgés qui disent ne plus dormir, leur temps de sommeil reste pratiquement le même. Mais ce sommeil est de moins en moins récupérateur. La fatigue s'accentue.

Comment régler vos pendules :

- L'administration de mélatonine à des heures très précises : cette hormone indique la notion de jour et de nuit à notre organisme. Mais la preuve qu'une telle médicamentation résoudrait les problèmes de rythmes biologiques n'est pas formelle. Il a seulement été remarqué que la perturbation du sommeil chez les personnes âgées correspondait parallèlement à la baisse de la mélatonine nocturne.
L’administration pharmacologique de la mélatonine réduit le temps de latence à l’endormissement et augmente la qualité et la durée totale du sommeil, sans altérer son architecture.
- La caféine à libération prolongée peut également aider à resynchroniser les rythmes hormonaux.
- L'utilisation de la lumière forte
- Quant aux antidépresseurs, ils favorisent l'endormissement, mais ils n'aident pas à résoudre les soucis de rythmes biologiques.

Écoutez les explications détaillés du professeur Yvan Touitou, ancien chef de service de biochimie médicale et biologie moléculaire, à la faculté de médecine Pierre et Marie Curie à Paris, président en 2007 de l'Académie nationale de pharmacie.

En savoir plus :

- Professeur Yvan Touitou, membre de l'Académie nationale de pharmacie->http://www.acadpharm.org/index.php?PAGE=anuvisu&id=], correspondant de [l'Académie nationale de médecine

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